Immobilier en Corse © Carsten Madsen/Thinkstock
Pour devenir propriétaire en Corse, faudra-t-il y résider depuis au moins cinq ans ? C'est la volonté de l'Assemblée de Corse, qui a adopté ce vendredi la création de ce statut de résident. Mais cette décision est anticonstitutionnelle.
Anticonstitutionnelle, mais à haute teneur symbolique. La décision de l'Assemblée de Corse du 25 avril dernier, appelant à la création d'un statut de résident permanent d'au moins cinq ans pour pouvoir devenir propriétaire sur l'île de Beauté, ne peut pas s'appliquer en l'état.
Nombre de juristes s'accordent à dire en effet qu'elle engendre, non seulement une rupture d'égalité entre les citoyens français dans l'accès à la propriété inscrite dans notre Constitution - comme le rappelle Didier Maus, expert en droit constitutionnel, à nos confrères du Monde - mais aussi au regard du droit européen en empêchant toute personne non insulaire à acheter terrain ou bien corse.
Le président du conseil exécutif de la Collectivité territoriale de
Corse, Paul Giacobbi, député PRG de Haute-Corse, rapporteur de ce projet, voit pourtant dans l'adoption de ce statut
"une étape, qui n'est en rien discriminatoire." Et d'ajouter, "
toutes sortes de droits sont déjà liés en France à la résidence, qu'il s'agisse notamment de fiscalité ou de stationnement", évoquant l'existence d'un tel dispositif juridique dans
d'autres pays européens. Mais le rapport le mentionne d'ailleurs : "Vouloir bâtir un tel dispositif dans le cadre actuel de la Constitution serait vain. Seule une mention de la Corse dans la loi fondamentale, prévoyant explicitement la possibilité de prendre des mesures de protection qui apparaissent nécessaires peut fonder le dispositif envisagé".
La Corse est confrontée à une augmentation importante des prix du foncier bâti et non bâti et au développement d'un marché fortement spéculatif au détriment de la population locale. Un chiffre symbolise notamment ce constat : pas moins de 35% du parc corse est constitué par des résidences secondaires (RS).
"Dans certaines communes, le taux de RS peut même atteindre entre 60 et 68% du parc total, précise le rapport présenté à l'Assemblée corse,
notamment en zone littorale, mais pas uniquement." Et de citer l'Insee : le nombre de RS a été multiplié par 10 de 1968 à 2007 (atteignant 71.000) alors que celui des résidences principales a seulement doublé sur la même période.
A noter que la loi Alur, adoptée récemment, prévoit notamment la création de l'Office Foncier de la Corse, dont les principales missions prévoient l'acquisition et du portage foncier, afin de contribuer à la réalisation de logements à destination de la population locale.