Retour d'expérience dix ans après sur l'écoquartier Fréquel-Fontarabie, 20ème arrondissement de Paris © S.C.Batiactu
Imaginé dès 2004, comme un quartier urbain écologique, précurseur du plan Climat de la ville de Paris, l'îlot Fréquel-Fontarabie, situé dans le 20ème arrondissement de Paris, est truffé de bâtiments passifs. Mais des questions se posent : les bâtiments tiennent-ils leurs promesses en matière de consommation énergétique ? Qu'en pensent les concepteurs, les gestionnaires et surtout les occupants ? Compte rendu.
Situé dans le quartier Réunion-Père-Lachaise, dans le 20ème arrondissement de Paris, l'îlot Fréquel-Fontarabie*, imaginé dès 2004, présente la particularité d'être une "opération pilote" de la mairie de Paris en matière d'écoquartier avec des objectifs ambitieux notamment de mixité urbaine et d'économie d'énergie. D'ailleurs, une mention spéciale a été accordée en 2013 par le ministère de l'Ecologie dans le cadre du Grand prix national écoquartiers.
Ce projet confié par la Ville de Paris à la Société immobilière d'économie mixte de la Ville de Paris (SIEMP) comprend la réalisation de 109 logements sociaux.
"C'est en juin 2004 que la Ville de Paris, la SIEMP et Paris Habitat OPH se sont engagées dans une démarche pionnière", nous explique Florence De Massol, adjointe à la maire du 20ème, chargée de la démocratie locale, du budget participatif et des espaces verts.
Et l'enjeu a alors été de recréer un morceau de ville sur lui-même, en plaçant l'innovation technologique au cœur des programmes de construction et de réhabilitation, en favorisant la mixité sociale par une offre renouvelée en logements sociaux et la mixité fonctionnelle par l'implantation d'équipements et de locaux d'activités."
Le parti général d'aménagement mis en œuvre par l'architecte coordonnateur Eva Samuel, suite à une large concertation avec les associations du quartier, a permis au final de préserver et de renforcer les qualités présentes sur le site, notamment de conserver la densité actuelle (109 logements par habitants) et le caractère structurant de l'espace central en tant qu'espace vert.
"Sur cet arrondissement où la densité est extrême, il était fondamental de retrouver une petite échelle", précise Eva Samuel, soutenue par la Siemp, avec les chargés de projet Roland Pellerin et Chloé Dubost.
* Visite organisée par l'Association des journalistes de l'habitat et de la ville (AJIBAT), après un premier état des lieux en 2010.
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Retour d'expérience : Dix ans après, dans un écoquartier parisien...
L'aspect fondamental de la densité
L'aspect fondamental de la densité - Retour d'expérience dix ans après sur l'écoquartier Fréquel-Fontarabie, 20ème arrondissement de Paris © S.C.Batiactu
Autre constat : différentes périodes d'urbanisation successives ont considérablement modifié le tissu urbain du quartier, en y amenant de nouvelles formes urbaines tout en conservant cette notion d'îlot.
Outre l'aspect fondamental de la densité, ce projet de rénovation de l'îlot s'inscrit donc dans le respect des principes et des objectifs, qui sont les suivants, poursuivent les concepteurs :
"Maîtriser les impacts du projet sur l'environnement extérieur réduire les charges et les coûts de fonctionnement des bâtiments; garantir un environnement intérieur des bâtiments sain et confortable; inscrire le projet dans une démarche de solidarité sociale et citoyenne."
Par ailleurs, l'espace central de l'îlot, constitué d'une placette, d'un jardin public et de cheminements piétons, constitue également une partie importante du programme.
"Les projets d'habitats passifs sont positionnés sur des parcelles qui bénéficient des meilleures orientations", ajoute la Siemp.
L'aspect fondamental de la densité
"Le petit Beyrouth"
"Le petit Beyrouth" - Retour d'expérience dix ans après sur l'écoquartier Fréquel-Fontarabie, 20ème arrondissement de Paris © S.C.Batiactu
Les différentes opérations programmées dans ce "tissu urbain", surnommé "le petit Beyrouth", notamment touché par l'insalubrité ont avancé à grand pas : le premier chantier a démarré fin 2009 et les derniers logements réalisés par Lan architecture remontent, eux, au 1er trimestre 2014. La particularité ? Chaque maître d'œuvre était libre de développer sa vision de la durabilité en proposant des interventions expérimentales qui répondent aux ambitions du Plan climat de la ville de Paris, soit à une consommation maximale de 50 kWhEP/m² an, soit l'exigence de la RT 2012. Les maîtres d'œuvre se sont aussi engagés à ne prescrire que des matériaux renouvelables, la priorité étant donnée aux produits à base de bois ou de matériaux d'origine végétale.
"Le petit Beyrouth"
Les exigences PassivHaus
Retour d'expérience dix ans après sur l'écoquartier Fréquel-Fontarabie, 20ème arrondissement de Paris © S.C.Batiactu
Parmi les bâtiments référents de l'îlot, l'immeuble collectif parisien conforme aux exigences PassivHaus, livré par l'architecte Pascal Gontier en novembre 2010 en fait partie.
"D'une superficie totale de 1.640 m², l'immeuble se distingue par deux bâtiments autonomes et reliés par des terrasses suspendues, de sorte à éviter les déperditions créées par les planchers filants, nous indique-t-il.
A cette époque, le label BBC n'existait pas encore, seul la RT 2005 était réglementaire."
Des façades conçues de mélèze et d'acier autopatinable, jusqu'à l'énergie géothermique du sol, en passant par les structures en béton et à une ventilation double flux, répondant aux besoins en Haute Qualité Environnementale (HQE), l'ensemble de la structure a été pensé pour générer près de 13 kWh/ep/m2.an, soit deux point de moins que la norme Passivhaus pour le chauffage. Sans compter 26 cm de laine de roche pour l'isolation et des capteurs solaires pour l'eau chaude sanitaire et une toiture végétalisée et la récupération des eaux de pluie complètent le dispositif environnemental.
"On a d'ailleurs beaucoup pensé à la compacité des volumes qui réduit surtout les ponts thermiques angulaires propres à chaque angle du bâtiment", conclut Pascal Gontier.
Les exigences PassivHaus
Exigence et usage
Exigence et usage - Retour d'expérience dix ans après sur l'écoquartier Fréquel-Fontarabie, 20ème arrondissement de Paris © S.C.Batiactu
De son côté, Armand Nouvet, associé à cette période à l'agence Babled-Nouvet-Reynaud Architectes, a choisi sur le quartier de mener une réflexion alliant l'exigence de la construction et de l'usage pour atteindre la HQE sans recourir à "l'accessoirisation technologique".
"Il était important d'évacuer l'approche machiniste et sa contraignante obligation de maintenance de ce programme de 20 logements sociaux livrés en juin 2013",garantit Armand Nouvet.
Le bâtiment principal situé au 17-19 rue des Orteaux, à proximité de la crèche de 60 places du quartier est organisé autour de deux cours de service pour ouvrir les pièces.
"Nous avons, ici, un système porteur en colonnade qui rythme les appartements en enfilade sur la façade principale, nous détaille le concepteur.
Les pièces sont d'ailleurs séparées par des portes à galandage libérant les perspectives intérieures." Sur la structure principalement bétonnée, a été fixé du bois pour garantir le confort acoustique.
"Côté vitrages, deux parois coulissantes enferment les espaces non chauffés de 30 cm à 1,20 m d'épaisseur", glisse également Armand Nouvet. Avant de résumer la conception :
"C'est la façade, notre système de chauffage de logements."
Exigence et usage
Des occupants pas encore sensibilisés
ecoquartier Fréquel © S.C Batiactu
Si le défi de restructurer le quartier préexistant a été relevé par les acteurs du projet et les habitants de l'écoquartier Fréquel-Fontarabie, un seul regret nourrit la Siemp au quotidien : la démarche citoyenne à l'intérieur des logements sociaux.
"Pour garantir les performances économiques des bâtiments, les habitants doivent encore prendre conscience des règles d'usages : fermer les fenêtres, et mettre les thermostats à 25 °C, confie Roland Pellerin, chargé de projet à la Siemp.
Malgré les informations et les préventions dans les immeubles, nous comptons encore sur leur responsabilité." Finalement, entre la théorie et la pratique, il reste un grand pas à franchir.
Des occupants pas encore sensibilisés
Fiche technique
Maître d'ouvrage: SIEMP. Maîtrise d'œuvre : plusieurs architectes ont été désignés pour assurer la conception et la construction du projet, qui est décomposé en lots. Lot 1 - Babled-Nouvet-Reynaud, livré en juin 2013 Lot 2 - BOB 361 Jean-Michel Culas, livré en août 2013 Lots 4a et 7 Sonia Cortesse, livrés en janvier 2013 Lot 5 - Pascal Gontier, livré en novembre 2010 Lots 6a/6b/6c/3 /4b - LAN Architecture livrés au 1er semestre 2014 pour la crèche - Avenier Cornero, livrée fin 2013 pour les espaces publics - Claire Gilot, Daphné Mandel Exit paysagistes associés, la conception du jardin est réalisée par un paysagiste de la ville de Paris: dernière phase, 2ème trimestre 2014. Maître d'œuvre espaces publics : Claire Gilot, Daphné Mandel Exit Paysagistes associés. La participation citoyenne: l'ensemble des acteurs locaux (élus, associations, conseil de quartier, habitants).