Un appartement tout noir, sublimé par des objets du quotidien de l'un des artistes français les plus renommés. C'est l'intérieur de l'appartement de Serge Gainsbourg, réhabilité par l'agence ORY.architecture. Situé au 5 bis rue de Verneuil, le logement dans lequel a vécu le chanteur entre 1969 et 1991 est aujourd'hui ouvert au public. Les premières visites ont pu se tenir en septembre 2023. L'esprit d'origine a été préservé, pour donner aux visiteurs un aperçu de la vie du compositeur français dans ce quartier du VIIe arrondissement de Paris. "C'est à cet endroit que Serge Gainsbourg nous quitta à l'âge de 62 ans. Il était en train de composer lorsqu'une crise cardiaque l'emporta. Depuis rien n'a changé, et c'est là toute la puissance du lieu qui, d'un lieu de mémoire, s'est transformé en lieu de rencontre", raconte l'agence dans un communiqué.

Une opération déclinée en deux sites

Le projet, baptisé Maison Gainsbourg, comprend deux sites, l'hôtel particulier de Serge Gainsbourg de 130 m² et, à quelques pas, au 14-16 rue de Verneuil, un espace muséographique dédié à son œuvre s'étalant sur 310 m². La maison a été réhabilitée et est aujourd'hui ouverte au public à l'initiative de la fille du défunt, Charlotte Gainsbourg. L'agence d'architecture avait pour mission d'inviter les visiteurs chez Serge Gainsbourg, "dans son intimité la plus totale", et de les transporter dans le temps. Surtout, il fallait garder en l'état la demeure tout en la mettant aux normes pour accueillir des visiteurs.   L'adresse était devenue, au fil des années, un lieu incontournable de la capitale, sans même pouvoir être visité. Sa façade donnant sur la rue est recouverte de graffitis et de messages en l'honneur du compositeur. "C'est une fresque urbaine vivante, en perpétuel renouvellement, du street-art subversif, provocant, émouvant, qui colle bien à la personnalité anticonformiste de l'artiste et qui participe pleinement à son hommage", estime l'agence d'architecture. Cette fresque a été préservée et continuera de rester le "support d'une expression artistique libre".

Pas de travaux à l'intérieur

"Lorsque l'on passe la grille d'entrée, un passage étroit mène vers une entrée discrète. Le bâtiment n'a rien d'extravagant et l'ensemble est plutôt modeste", raconte ORY.architecture. L'endroit servait auparavant d'écuries, qui ont ensuite été transformées en logis. "Il est éloigné de l'espace luxueux et spacieux que l'on s'imagine pour un tel artiste", précise l'agence. Pour guider les visiteurs jusqu'à l'entrée de la maison, une marquise a été créée. Il n'y a pas eu de modifications ni de travaux à l'intérieur du logement. Un parcours a plutôt été imaginé pour guider le public, à distance des objets, afin qu'il puisse s'imprégner de l'univers de Serge Gainsbourg. Pour les fans, le logement symbolise à la fois le lieu de vie de l'artiste et son espace d'inspiration. C'est là qu'il collectionnait de nombreux œuvres et objets. Le public est transporté par une bande-son originale composée par Soundtrack Collective et Charlotte Gainsbourg. L'opération a séduit la Région Île-de-France, qui lui a décerné le label "Patrimoine d'intérêt régional" pour la préservation, la restauration et la mise en valeur du lieu.  

Un nouvel espace muséographique et un bar

A quelques numéros de l'appartement, l'espace muséographique a bénéficié d'une profonde restructuration d'ensemble et du remaniement des espaces existants. "Initialement maison d'édition puis espace bien-être sous une verrière vieillissante, c'est notamment dans ce bâtiment du XVIIIe siècle que les visiteurs viennent retirer leur billet pour visiter le 5 bis rue de Verneuil", indique ORY.architecture. Aujourd'hui, le bâtiment réunit un musée, une librairie-boutique et un piano-bar, nommé "Le Gainsbarre". C'est autour de celui-ci qu'a été conçu le parcours de visite sur deux niveaux. Les visiteurs, bercés par la voix de l'artiste, peuvent découvrir 450 objets originaux et images d'archive rares. L'entrée, noire et blanche, rappelle le sol du salon de l'hôtel particulier. Le style architectural et la matériauthèque du 5 bis sont aussi mis en lumière dans la scénographie du musée. Les studios d'architecture intérieure Jacques Garcia se sont chargés de décorer l'ensemble dans des teintes sombres, aux tissus lourds et nobles. Des travaux de transformation et d'extension du sous-sol ont permis de révéler des caves et voûtes, autour de l'immeuble en bois existant. La verrière a été transformée, améliorant l'acoustique du lieu et permettant à la lumière de pénétrer à l'intérieur. La devanture aussi a été retravaillée, pour être à la fois "sobre" et "très Saint-Germain, dans l'esprit spécifique des façades de la rue".