Craintes des impayés, dégradations… Les risques locatifs sont nombreux et constituent un frein à la mise en location de nombreux logements. Des mécanismes existent, mais sont-ils efficaces ? A quoi répondent-ils ?
"Avec la garantie des risques locatifs, la personne qui viendra frapper à la porte du locataire acculé face aux impayés, ne sera plus un huissier mais un travailleur social." Dans les mots de Jean-Luc Berho, président de l'APAGL (association pour l'accès aux garanties locatives) et vice-président de l'UESL (l'Union d'Economie Sociale pour le Logement), on retrouve tous les enjeux de la gestion des risques locatifs aujourd'hui : enjeux économiques, évidemment, mais surtout enjeux de société.
Favoriser l'accès au logement, rassurer les bailleurs, remettre sur le marché des logements vacants… Dans une société où le toit reste encore une denrée rare et convoitée, où la crainte de se retrouver à la rue est une des principales peurs des Français (58% d'entre eux selon Jean-Luc Berho), la question du logement est primordiale. Et même si professionnels et politiques savent le sujet explosif, l'aborder est un mal plus que nécessaire : il est indispensable.
Dans un marché de vente tendu, notamment dans les grandes agglomérations, les locations sont recherchées. Et aujourd'hui, comme le résume Monsieur Berho,
"les locataires potentiels ont de plus en plus de mal à trouver des logements économiquement et socialement accessibles (…) Si on fait le calcul aujourd'hui, il y a près de 55 à 60 % de la population française qui, pour des raisons de statut salarial ou de modestie économique, ont du mal à accéder voire à rester dans leur logement." Les lois se succèdent et mettent en place des dispositifs avec une problématique de taille : pallier aux risques locatifs tout en assurant un équilibre de protection bailleur/locataire.
Quels sont-ils ces risques ? Impayés, dégradations… Laurent Caillaud, administrateur de biens à la FNAIM, pose le problème :
"en pratique, les bailleurs sont de plus en plus demandeurs de garanties contre les risques locatifs. D'autant plus qu'ils savent que, malgré le temps qu'ils passent dans le choix de leur locataire, la situation de ce dernier est complètement aléatoire : du jour au lendemain, il peut subir un revers." Un revers aux conséquences parfois tout aussi dramatiques pour le bailleur : le loyer attendu sera un complément de retraite, un remboursement d'un prêt…
Pour répondre à tous ces enjeux, il existe plusieurs garanties : la garantie des impayés de loyers classique se souscrivant auprès de son assurance, le Loca-Pass et aujourd'hui la GRL (Garantie des Risques Locatifs). Cette dernière garantit par l'Etat le remboursement des impayés et assure également un suivi social auprès du locataire en difficulté.
Certains restent encore sceptiques :
"pour nous à la CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie), la GRL est un mécanisme trop compliqué" selon Thierry Sariez de la CLCV. En cause, la difficile jonction entre le locataire titulaire du Pass-GRL et le propriétaire qui a souscrit la garantie. Des démarches à faire chacun de son côté. Pour la CLCV, il faut
"un fonds universel de garantie alimenté par une partie de la caution, un fonds géré paritairement".
Mais du côté des gestionnaires de la GRL, le discours est tout autre.
"Aujourd'hui une centaine d'administrateurs de biens ont d'ores et déjà signé un contrat GRL et tous s'accordent à dire que le service apporté répond aux attentes" indique Christian Jeanvoine, président de GRL-Gestion. Le système se met en place, les outils techniques (site internet notamment) se créent. Il est encore trop tôt pour avoir un recul sur son efficacité, mais les professionnels interrogés veulent, dans l'ensemble, y croire.
Sa réussite passera notamment par la communication vers les bailleurs individuels privés.
"Il y a aujourd'hui en France près de 10 millions de logements loués, 2 millions changent de main chaque année. Sur tous, on compte seulement 300.000 impayés par an et dans 90 à 95 % le problème ne vient pas de la mauvaise foi, mais relève du social. Avec la GRL, nous allons faire en sorte que ces 290.000 restants soient traités socialement", explique Jean-Luc Berho. La GRL restera une avancée de ce point de vue là.
Pour pallier les risques locatifs, tous les professionnels le disent, l'assurance est le meilleur moyen. Mais qu'elle soit classique, privée ou relevant de la GRL, elle reste limitée dans le temps.
"Au bout de trois ou quatre ans où le locataire restera dans le logement, l'Etat ne pourra plus payer indéfiniment à sa place et il engagera une expulsion", explique un administrateur de biens.
Pour Sylvain Jutteau, directeur administrateur de biens de Century 21, le problème de fond reste la carence en logements.
"Je vois tellement de réformes arriver… Ce qu'il y a de sûr c'est qu'à force, nos bailleurs s'inquiètent de cette accumulation, qui a conduit à une instabilité législative. Qu'en restera-t-il demain ? L'action efficace serait d'agir sur le parc de logements existants en se posant la question de la réhabilitation de l'ancien et de la construction dans le neuf. En créant des logements, le marché se calmera."
voir :
La garantie des risques locatifs
La garantie des risques locatifs, bientôt universelle ?