Le Conseil d'analyse économique (CAE) a proposé au Premier ministre, en septembre dernier, la mise en place d'une taxation pour les propriétaires occupants. Ces derniers pourraient être imposés sur les loyers fictifs qu'ils toucheraient s'ils mettaient leur résidence principale en location, ainsi que sur l'augmentation annuelle de la valeur du bien.
L'État, qui encourageait jusque-là les citoyens à devenir propriétaires de leur logement, serait-il en train de faire volte-face ? C'est ce que l'on serait porté à croire, à la lecture d'un rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) remis en septembre dernier au Premier ministre. Il suggère notamment la création d'une taxe destinée aux propriétaires occupants, calculée sur la base des loyers que leur bien pourrait leur rapporter... s'il était mis en location.
Concrètement, la note propose d'imposer les
"loyers implicites nets des intérêts d'emprunt", c'est-à-dire le montant des loyers que percevrait le propriétaire s'il louait son bien immobilier. Cette somme, dont seraient déduits les intérêts d'emprunt, s'ajouterait ainsi aux divers revenus du ménage, et seraient taxés comme tels.
Par ailleurs, le CAE souhaiterait
"annualiser la plus-value réelle (en déduisant l'inflation) avant de l'imposer au barème général de l'impôt sur le revenu". En d'autres termes, le propriétaire occupant serait taxé chaque année sur l'augmentation de la valeur de son bien immobilier, en fonction des fluctuations du marché.
Cet impôt ne concernerait que les propriétaires occupants ayant remboursé intégralement les prêts immobiliers contractés pour l'achat du bien en question. Il s'agirait donc d'une nouvelle taxation du capital, sous prétexte de
"rééquilibrer la fiscalité", estime le CAE.
La proposition est très violemment dénoncée par l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), qui évoque
"une proposition funeste et provocatrice" dont la mise en œuvre
"présenterait un risque majeur pour la paix sociale en France".
Par la voix de son président, Jean Perrin, l'association défend les propriétaires occupants :
"Les assimiler à des rentiers sous prétexte qu'ils ont enfin remboursé leur prêt relève de la provocation pure et simple".
A l'heure actuelle, les propriétaires occupants, qui sont exonérés de taxes liées à leur logement (hormis la taxe foncière) et même de taxation sur les plus-values immobilières consécutives à la vente du bien, bénéficient d'une fiscalité très favorable.
Trop favorable, peut-être, puisque ces foyers fiscaux sont dans le collimateur du CAE. Mais l'idée d'une taxe pour les propriétaires occupants avait déjà été évoquée par le Haut conseil de financement de la protection sociale, dans une note également remise au Premier ministre, en juin dernier.
Avant eux, l'OCDE, dans son rapport annuel sur la France publié en mars 2013, avait formulé la même remarque concernant le favoritisme envers les propriétaires occupants. En 2012, déjà, des membres du Parti socialiste avait suggéré la création d'une telle taxe au Président de la République, à l'occasion des 100 jours de son arrivée à l'Élysée.
Plus surprenant encore : une telle mesure existait déjà au début du XXème siècle ! La loi taxant les ménages propriétaires de leur résidence principale avait été abrogée en 1964 pour encourager l'accession. Les propriétaires occupants, qui représentent aujourd'hui plus de la moitié des foyers français, ont donc, décidément, du souci à se faire.