Entre "hype" attitude ou tendance "écolo-chineuse", notre cœur balance. La maison fait partie de la famille, il faut la parer de ses plus beaux atours ! Effet marketing ou fait de société, la décoration s'accorde aujourd'hui une place de choix dans nos vies.
Mon fils me traite d'arriérée quand je décide de jeter notre vieille armoire normande décatie. Ma fille EXIGE les derniers stickers de mur en vinyle. Mon mari regarde en boucle les rediffusions de Question Maison. Moi-même, je cours les show-rooms déco, délaissant la mode. Et pour finir, on envisage sérieusement d'engager un coach déco pour choisir la couleur du mur du séjour. Mais que se passe-t-il ?
Désormais, la décoration touche toutes les couches de la population et toutes les générations. Près de 40% des Français font de l'équipement de la maison un poste prioritaire en dépenses(1). Alors effet marketing ou fait de société ?
Génération "précarisée", "insécurisée", "11 septembrisée", mais génération accro au design et à la bricole ! Nous sommes plus de 5,2 millions à regarder Valérie sur M6 (2) nous expliquer comment repeindre son mur, 1 à 1,5 million à rêver que la porte ne sonne et qu'on entende un joyeux "Bonjour ! Philippe Demougeot,
SOS Maison" (3)! Le "bien-être chez soi" est une donnée indispensable pour comprendre ce phénomène : face aux agressions, aux frustrations de l'extérieur, on prend plaisir à faire son nid, son cocon aménagé.
Avec le lancement de "Du côté de chez vous TV", il est également possible de rester 24/24h devant son écran à regarder des émissions de déco : il suffit de trouver une "box", branchée sur le câble ou le satellite. Avec Internet, la communauté déco grandit : on y trouve ou échange des astuces et des bonnes adresses, comme on y "raconte" sa maison sur son blog. Cette surinformation a un avantage : elle éduque le consommateur lambda aux arts décoratifs, au mobilier contemporain et plus largement à l'aménagement intérieur.
Jusqu'alors réservé à une élite, le design démocratisé et distribué est devenu un véritable produit de consommation. La starification des designers, qu'ils s'appellent Putman, Starck ou encore Gomez, a contribué à le rendre accessible. Non pas que le tout un chacun pourra s'offrir facilement leurs produits ! Mais ils font rêver et ont élevé le design au rang d'art nécessaire, aidés en cela par des médias omniprésents et omnipotents. Du coup, le particulier veut appliquer chez lui ce qu'il a vu dans ses magazines préférés.
Côté positif : la créativité s'envole, la jeune génération de designers surfant sur cette tendance médiatique. Parfois à leurs dépens : étoiles filantes de la déco, ils alimentent une "Star'Ac" du design, selon Thierry Conquet, président du Conseil Français des Architectes d'Intérieur (CFAI).
Grâce à Ikea, Habitat, Alinéa et les autres, on sait aujourd'hui qu'un meuble ne dure pas toute la vie, et qu'on peut avoir quelque chose de beau et de pratique à prix correct. Mais l'inutile à tarif prohibitif a également sa place dans la maison : c'est aussi le propre de la décoration. Un trophée de chasse en cagette pour 300 € dans son salon, c'est tellement "hype" !
En résumé, selon un professionnel du secteur : "l'autoroute démocratique d'Ikea s'est scindée en deux avec, d'un côté, la starification du design à prononcer 'dizaïn' façon 'hype', et de l'autre, l'hyper vintage bricolo".
Entre les "hype dizaïn", le "design popu", la chine, la bricole, tout ça en n'oubliant pas l'avenir de la planète parce que "l'environnement c'est important"... On ne chôme pas sur la planète déco !
Allez, et si on allait pique-niquer dans le salon avec la dernière vaisselle jetable Starck ?!
1.Ipsos 2002.
2.Médiamétrie, D&CO, M6.
3.France 5.