Lucioles, vers luisants et poissons abyssaux créent leur propre lumière. Dès lors, pourquoi ne pas utiliser cette capacité pour créer des objets lumineux qui ne nécessitent ni raccordement électrique, ni produit chimique ou illumination préalable ? Quatre étudiants français ont imaginé un concept qui a remporté plusieurs concours d'innovation. Sandra Rey, l'une des co-fondatrices de Glowee nous éclaire sur ces débuts prometteurs.
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L'aventure a démarré dans le cadre du prix Artscience, en 2013. La thématique était la biologie synthétique. En oubliant les contraintes techniques, il fallait imaginer des solutions innovantes", débute Sandra Rey, co-fondatrice de Glowee (ex-Organight). "
Et tout est parti d'un documentaire sur les créatures des profondeurs qui produisent de la lumière. Alors qu'il y avait une loi sur l'interdiction de l'éclairage des vitrines et de lutte contre la pollution lumineuse, nous nous sommes intéressés à la question. Mais tout était encore très théorique quant aux usages possibles", poursuit-elle. Contre toute attente, l'équipe d'étudiants remporte le concours. Grâce à une campagne de communication réussie, l'idée - toute simple - d'utiliser des micro-organismes marins pour leur bioluminescence, suscite beaucoup d'intérêt.
L'aventure se poursuit donc, avec la possibilité pour les étudiants d'accéder aux laboratoires de l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), entre septembre et décembre 2014, afin de valider leur concept. Puis ils signent une convention de collaboration avec le CEA pour développer un premier produit à usage événementiel qui devrait être prêt à la mi-2015. "
La durée de vie de 24 heures des organismes dans l'enveloppe est encore limitée, mais nous avons besoin d'un produit qui soit testé face au public", explique Sandra Rey.
Technologiquement, il se présentera sous la forme d'une coque transparente remplie de liquide contenant à la fois des micro-organismes bioluminescents et des nutriments. "
Dès que des sucres sont introduits dans le milieu, ils émettent une lumière bleu-vert, de 480-490 nanomètres de longueur d'onde, qui est imperceptible de jour mais bien visible la nuit", nous précise-t-elle.
L'enveloppe souple - qui pourra prendre n'importe quelle forme - ne contient qu'une quantité limitée de nutriments et les micro-organismes meurent assez rapidement. "
Mais nous travaillons à régénérer le système, comme un micro-aquarium. Nous planchons également sur l'émission d'autres couleurs", glisse la co-fondatrice.
Bioluminescence jour/nuit © Glowee
Mais quelles seront les applications de ces poches bioluminescentes ? "
Elles sont très nombreuses. La signalétique, par exemple, est un support parfait pour cette lumière dont l'intensité ne varie pas", déclare Sandra Rey. Car, contrairement aux réactions chimiques lumineuses observées dans les bâtons lumineux type Cyalume, et contrairement au processus physique de phosphorescence, la bioluminescence ne s'épuise pas tant que l'organisme est en vie. L'éclairage des routes, celui de lieux isolés non raccordés, l'immobilier, le design automobile... les pistes sont innombrables. Des contacts seraient d'ores et déjà pris avec le secteur de la construction.
Quant au coût de cette biotechnologie, il est encore un peu flou : "
La matière biologique est peu chère puisqu'elle se reproduit. En revanche, le contenant représente une dépense plus élevée, car il est soumis à plusieurs contraintes. Il doit être biocompatible, perméable au gaz, recyclable...". La spécialiste assure qu'en fin de vie, le produit peut être récupéré et utilisé afin de produire de l'énergie renouvelable.
Le projet Glowee a déjà séduit plusieurs jury internationaux, dont ceux du "Prix Start-Up Fnac" ou du "Ben & Jerry's Core". Derniers en date, les jurés du "Elevator Tour Paris" où l'équipe a été sélectionnée parmi 60 autres pour bénéficier d'un financement de 75.000 € apporté par des business angels. De quoi poursuivre les développements et l'industrialisation du concept. La vie est bio-tiful !