Créateur incontournable qui prônait le design au service du public, Pierre Paulin a marqué le XXe siècle par ses fauteuils devenus cultes, mais aussi par sa vision du mobilier. Une exposition rétrospective unique lui rend hommage au Centre Pompidou, à Paris. En images.
Il prônait le design pour tous, la création au
service du public... et pourtant, il a marqué l'histoire en travaillant pour deux présidents de la République. Pierre Paulin (1927-2009) est peut-être le designer français le plus célèbre, moins par son nom que par l'empreinte que ses œuvres ont laissée dans l'univers de la création.
Butterfly, Mushroom, Amphis, Ribbon, les noms de ses fauteuils, devenus mythiques, sonnent comme des objets de plaisir. Pourtant, Paulin n'attribuait à ses sièges que des codes, F582 ou F560, et laissait aux éditeurs de ses meubles le soin de choisir un intitulé plus poétique. Loin d'être des pièces de collection à l'accent vintage, ces fauteuils, toujours édités, sont furieusement actuels. L'ergonomie et le confort, prédominants dans l'œuvre de Paulin, se révèlent être des critères intemporels...
Mais c'est un autre visage du célèbre Pierre Paulin que l'exposition rétrospective au Centre Pompidou laisse entrevoir. Aménagements temporaires pour un salon professionnel... ou pour les salons de l'Élysée, créations monumentales ou petits objets de la maison, le créateur a touché à tout ce qui fait le quotidien des Français.
La commissaire de l'exposition Cloé Pitiot s'est plongée dans la vie de l'homme, dans les archives de l'inventeur, et dans l'esprit du designer, pour offrir au public une rétrospective à ne surtout pas manquer.
Découvrez pourquoi en pages suivantes.
Raison 1 : Découvrir la genèse des fauteuils signés Pierre Paulin
Fauteuil F582 dit Ribbon Chair, Pierre Paulin 1966 © Coll. Centre Pompidou, musée national d'art moderne / Photo : Bertrand Prévost
Pierre Paulin est avant tout célèbre pour des dizaines de modèles de fauteuils devenus cultes. Son esprit aiguisé et son incroyable perception des trois dimensions ont fait du designer français une figure incontournable de la création.
L'exposition rétrospective est l'occasion de découvrir la réflexion de Paulin. On découvre, par exemple, comment il a conçu son fauteuil Anneau :
"Je prends deux manches à balai, je les appuie contre le mur, et à partir de papier kraft, je réalise un anneau, qui sera en cuir, et le tour était joué !". Ou encore, qu'il a eu l'idée de son célèbre Ribbon chair (photo) en pliant... une serviette de table !
Raison 1 : Découvrir la genèse des fauteuils signés Pierre Paulin
Raison 2 : Tester les fauteuils mythiques de Pierre Paulin
Raison 2 : Tester les fauteuils mythiques de Pierre Paulin - Fauteuil F560 dit Mushroom, Pierre Paulin 1960 © Coll. Centre Pompidou, Musée national d'art moderne/ Photo : B. Prévost
Pierre Paulin prônait le design au service du public. Il aurait donc été bien dommage de découvrir ses créations uniquement avec les yeux. Cloé Pitiot, commissaire de l'exposition rétrospective, a justement disposé plusieurs éditions récentes des fauteuils cultes du designer au sein même de l'exposition.
Devant l'entrée de la galerie, deux grands canapés Amphis (également nommés Osaka) accueillent ainsi le public. A l'intérieur, tout en regardant une série de petits films décrivant les étapes de création des différents sièges, le visiteur aura la chance de pouvoir les tester. On se love avec plaisir dans les Ribbon chair, Mushroom (photo), Tulip, et autre Butterfly - une expérience qui vaut le détour !
Raison 2 : Tester les fauteuils mythiques de Pierre Paulin
Raison 3 : Pierre Paulin n'a pas fait que des sièges mythiques !
Raisoir Calor signé Pierre Paulin © Archives Paulin
On connaît bien sûr Paulin pour ses sièges mythiques, mais le plus célèbre designer français a touché à tout ! Fauteuils de jardin en plastique blanc, fers à repasser pour la marque Calor, assiettes en porcelaine pour la Manufacture de Sèvres, lustres magistraux, etc.
"Après avoir créé son agence, ADSA, et travaillé pour Georges Pompidou à la redécoration de pièces de l'Elysée, il a souhaité retomber dans l'anonymat pour un temps", analyse Cloé Pitiot.
Raison 3 : Pierre Paulin n'a pas fait que des sièges mythiques !
Raison 4 : Les influences japonaises et orientales de Pierre Paulin
Maquette d'aménagement intérieur N° 4, Pierre Paulin 1970 © Coll. Centre Pompidou, musée national d'art moderne / Photo : JC. Planchet
Outre un voyage dans les pays scandinaves, Paulin visite l'Inde et le Japon. Il y découvre la culture du tapis et du mobilier bas, et réfléchi à de nouveaux concepts au ras du sol, à l'image de son tapis Siège.
Par la suite, dans les années 70, Pierre Paulin imagine un concept d'aménagement intérieur (photo) basé sur des éléments à combiner entre eux, pour une modularité extrême, qui ne verra malheureusement jamais le jour. Les modules à poser au sol, notamment, sont librement inspirés des tatamis japonais.
Raison 4 : Les influences japonaises et orientales de Pierre Paulin
Raison 5 : Pénétrer une reconstitution du salon de Pierre Paulin
Tapis-Siège, Pierre Paulin 1980 © Coll. Centre Pompidou, musée national d'art moderne / Photo : G. Meguerditchian
Après avoir testé quelques-unes des pièces cultes du maître du design français, on se déchausse pour rentrer dans un pan d'histoire : une reconstitution inédite du salon que Pierre Paulin avait aménagé dans sa villa des Cévennes, La Calmette.
Un épais tapis, Diouan, s'étend au sol... mais aussi au mur. Y trônent quatre fauteuils Tongue, qui accueillent le visiteur. L'une des nombreuses installations présentées grâce à la collaboration de Maïa Paulin.
On rêverait aussi de tester le tapis Siège, présenté un peu plus loin dans l'exposition (photo) : un tapis épais donc les quatre coins peuvent être relevés, pour s'y adosser. Un espace que les (grands) enfants adoreraient investir.
Raison 5 : Pénétrer une reconstitution du salon de Pierre Paulin
Raison 6 : Découvrir des pièces exclusives issues de la collection privée des Paulin
Siège Déclive, Pierre Paulin 1968 © Coll. Centre Pompidou, musée national d'art moderne / Photo : P. Migeat
Cloé Pitiot a réalisé un travail de titan pour réunir de nombreuses pièces rares signées Pierre Paulin. L'ont aidée dans sa démarche, les proches du designer, en particulier sa veuve Maïa Paulin, qui a concédé le prêt de plusieurs pièces issues des archives personnelles de la famille.
On découvre ainsi des pièces jamais éditées, comme le siège Déclive (photo), donc chaque élément peut être orienté individuellement, ou encore la tente conçue par Paulin pour abriter le stand de son éditeur Artifort au salon Eurodomus à Turin en 1969. Les films de famille Super 8, où l'on découvre Paulin testant ses créations, valent également le coup d'oeil.
Raison 6 : Découvrir des pièces exclusives issues de la collection privée des Paulin
Raison 7 : (Re)découvrir les créations de Pierre Paulin pour l'Elysée
Pierre Paulin Elysee 2 plafond © Elysée, 1971, P. Paulin - DR
Étape majeur dans la vie professionnelle de Pierre Paulin, son travail avec le Mobilier National, en particulier pour la rénovation de plusieurs pièces de l'Élysée. C'est le couple Pompidou qui, au début des années 70, lui propose de rénover trois pièces, une bibliothèque fumoir, une salle à manger et un salon, avec des critères pour le moins restrictifs : l'aménagement doit être monté dans le plus grand silence, et être entièrement démontable.
Paulin imagine un "espace dans l'espace", en tendant des textiles élastiques aux murs, de manière à faire disparaître complètement la pièce d'origine. Au plafond de la salle à manger (photo), il suspend 9.000 cannes de verre qui, rétroéclairées, se transforment en un lustre géant...
Si ces installations n'existent plus aujourd'hui, de petites maquettes, visibles dans l'exposition rétrospective, les reproduisent à l'identique.
Raison 7 : (Re)découvrir les créations de Pierre Paulin pour l'Elysée
Raison 8 : Voir de près le fauteuil conçu par Pierre Paulin pour François Mitterrand
Fauteuil du salon des Tableaux, palais de l'Elysée, Pierre Paulin 1971-1972 © Collection Mobilier national, Photo : Isabelle Bideau
Parmi les pièces rares réunies pour l'exposition, on ne manquera pas de remarquer le fauteuil dessiné par Pierre Paulin pour François Mitterrand en 1984. Une pièce historique issue des stocks du Mobilier National.
C'est l'une des pièces qui signe le retour au travail du bois pour Paulin. Le designer lui donner cinq pieds - peut-être en hommage au 5e président de la Ve République ? Le dossier et les accoudoirs du siège présentent un double cannage, qui crée un jeu d'opacité, d'ombre et de transparence, en fonction de l'endroit où l'on se place.
"Comme pour représenter la fonction présidentielle et son mystère", souligne Cloé Pitiot.
Plusieurs pièces de mobilier ayant meublé l'Elysée sont également présentées, à l'image du fauteuil du salon aux tableaux (photo).
Raison 8 : Voir de près le fauteuil conçu par Pierre Paulin pour François Mitterrand
Raison 9 : Comprendre les liens entre les créations culte de Pierre Paulin
Chauffeuse F598 dite Groovy, Pierre Paulin 1972 © Coll. Centre Pompidou, musée national d'art moderne / Photo : G. Meguerditchian
Dans l'esprit génial de Pierre Paulin, l'objet fabriqué n'est pas une fin en soi, mais plutôt un maillon supplémentaire dans la chaîne de la création. Ainsi, certains fauteuils qu'il a imaginés sont des déclinaisons améliorées de précédents sièges.
Par exemple, le fauteuil Anneau lui inspire le modèle F300, en plastique moulé ; le Butterfly, dont il
"étire les accoudoirs", devient la chauffeuse Groovy (photo) ; le mythique fauteuil Tongue donne lui à deux déclinaisons : le Face-à-face et le Dos-à-dos, qui combinent finalement deux exemplaires du siège d'origine, etc.
Raison 9 : Comprendre les liens entre les créations culte de Pierre Paulin
Raison 10 : Casser l'image froide du personnage Pierre Paulin
Siège F577 dit Tongue, Pierre Paulin 1967 © Coll. Centre Pompidou, musée national d'art moderne / Photo : JC. Planchet
Comme souvent les créateurs de génie, Pierre Paulin a eu ses détracteurs. Certains lui ont dressé de lui le portrait d'un homme froid et colérique. L'exposition menée par Cloé Pitiot rétablit une vérité plus subtile.
"Je me suis promenée chez lui et j'ai compris sa douceur, explique la commissaire d'exposition. Il avait une forme de timidité poussée qui a pu le pousser à la colère, mais son travail a toujours été pour l'homme".
L'analyse du processus de création des fauteuils culte de Paulin laisse apparaître, en effet, son intérêt pour les formes courbes du corps, et pour l'ergonomie en général. Loin du maître froid, on découvre ainsi un homme terriblement intelligent et avant-gardiste, mais non moins bienveillant.
Raison 10 : Casser l'image froide du personnage Pierre Paulin
Informations pratiques :
Exposition Pierre Paulin Du 11 mai au 22 août 2016 Centre Pompidou à Paris www.centrepompidou.fr