La réhabilitation de la Cité du Château à Longueau, dans la Somme, est le fruit d'un long travail et d'une riche collaboration entre les architectes des Bâtiments de France et de l'agence 3+1 architectes. A l'origine, ICF Habitat Nord-Est avait l'ambition de reconstruire entièrement ce quartier. Mais, les habitants attachés à leur cité ont alors décidé de la faire inscrire à l'inventaire des Monuments Historiques. Ce qui fût fait le 11 juillet 2008. Dès lors, le projet initial a dû être revu pour tenir compte des attentes des Bâtiments de France. "Un gros travail en amont a été mené avec les Bâtiments de France" pour réaliser cette vaste réhabilitation, souligne Romuald Sarraute. L'architecte du projet, Valérie Flicoteaux-Melling le confirme : "dès le début il y a eu une importante mise au point du projet avec le conservateur des BF". Elle précise : "certaines maisons étaient classées et d'autres non". La réhabilitation devait tenir compte de cela. Suite à l'expertise des maisons, il a alors été décidé d'en démolir certaines "très anciennes et présentant des problèmes de remontées capillaires", explique Romuald Sarraute. Ainsi, au total, cinq maisons individuelles ont été démolies. Par ailleurs, ICF Habitat Nord-Est étant propriétaire des bâtiments existants et de parcelles disponibles sur le terrain, il a été décidé de construire 55 nouveaux logements. Des constructions plus contemporaines aux performances énergétiques élevées ont donc été réalisées tout en respectant l'harmonie architecturale du site classé.

"L'inscription des 43 maisons de la cité du Château à l'inventaire des Monuments Historiques, nous a poussé à faire preuve d'ingéniosité et à travailler différemment sur ce projet. Le travail de recherches historiques mené par le cabinet 3+1 architectes et une étroite collaboration entre ce dernier, l'Architecte des Bâtiments de France et la DRAC Picardie ont permis d'élaborer un programme travaux respectant au plus près l'architecture d'origine de cette cité-jardin. Au défi de la « mémoire » de la cité s'est ajouté celui de la « modernisation » des logements", raconte Christine Richard, directrice général d'ICF Habitat Nord-Est.

Toutes les maisons ont été entièrement réhabilitées. Un important travail a été mené pour les isoler et les réagencer. Toutes les maisons ont été isolées par l'intérieur ainsi que les combles. "Nous ne sommes pas intervenus sur les dalles basse parce que cela coûtait cher, aurait fragilisé les bâtiments et que cela aura créé des problèmes d'accessibilité (PNR)", précise l'architecte. La structure des maisons n'a donc pas été modifiée.

Diagnostique des toitures

Compte tenu du budget serré du maître d'ouvrage, il était impossible de tout changer. Ainsi, 3 ou 4 toitures ont été entièrement démontées pour y poser des tuiles neuves rouges. Les tuiles démontées ont été réutilisées sur les toitures ayant besoin d'être rafraîchies. "Nous avons eu plus de charpentes dégradées que nous le pensions", raconte l'architecte. Selon elle, si toutes les réhabilitations avaient pu été menées en même temps, les porteurs du projet auraient pu se rendre compte de l'Etat réel des toitures dès le départ. A noter aussi qu'un gros travail sur les couleurs a été mené sur cette réhabilitation (nous y reviendrons page 6). Ainsi, l'ensemble des maisons est composé de toiture sombre et quatre maisons ont une toiture rouge.

Une grande partie des maisons comportait un escalier collé à la façade. Pour permettre une isolation intérieure de 15 cm, il a donc fallu les déplacer. Cette contrainte a été l'occasion de redistribuer les intérieurs vieillissants. Compte tenu du budget serré du maître d'ouvrage, tous les logements n'ont pas été transformés intérieurement. Ainsi, les maisons de plain-pied n'ayant pas d'escalier ont été moins modifiées. "Au final, compte tenu de l'équilibre budgétaire, nous nous sommes attachés à ne pas trop modifier et avons essayé autant que possible de ne pas toucher les structures", nous confie Valérie Flicoteaux-Melling.

"Au moment du diagnostic, nous avons fait des recherches historiques et trouver des textes détaillant la réflexion de l'architecte Gustave Umbdenstock pour cette cité", raconte Valérie Flicoteaux-Melling. Ce dernier appartenait au mouvement du régionalisme qui s'attache à faire varier les types de logements afin de ne pas être dans la répétition. Les architectes de Bâtiments de France et de l'agence 3+1 architectes ont ainsi identifié 11 typologies différentes sur 24 bâtiments. "La variation était un élément essentiel à prendre en compte", insiste Valérie Flicoteaux-Melling. Concrètement, les façades se démarquent par trois types de couleurs différentes : un sous-bassement dans les tons gris, et deux teintes d'enduits différentes, un gras et un lisse. "Nous avons retenus 4 jeux de tonalité pour les façades : beige, gris-beige, taupe et antilope", ajoute l'architecte. Chaque façade comprend ainsi une teinte claire et une foncée. Les menuiseries de chacune de maisons étaient également très chatoyantes.

Les menuiseries se remarquent par leurs couleurs vives. Les architectes ont recensé 6 couleurs : rouge, jaune, deux bleus et deux verts. Une fois les couleurs identifiées, un "jeu d'attribution de coloris" a été réalisé par les architectes. "Pas une maison n'a la même couleur", insiste Valérie Flicoteaux-Melling. "Donc, elles vibrent", nous dit-elle fièrement. Elle rappelle que pour ces attributions de couleurs, elle a rencontré trois à quatre fois les Bâtiments de France. Le travail de la couleur s'est porté également sur les clôtures. Tous les portillons ont été redessinés, tout comme les clôtures qui sont à nouveau composées de fils entre poteaux.

La réhabilitation de la Cité du Château à Longueau n'était pas un chantier simple puisqu'elle a dû se faire en site occupé. "Il s'est agi d'une opération à tiroirs", explique l'architecte du projet. Certains locataires ont été relogés dans des logements provisoires en attendant la rénovation de leur maison, d'autres ont profité de cette rénovation pour changer de typologie de logement. Rappelons qu'en parallèle de ces rénovations, 55 nouveaux logements ont été construits dans la Cité. Certains locataires ont donc choisi de vivre dans les nouvelles constructions. "Le calendrier de ce chantier, qui a duré 3 ans, a été entièrement lié aux résidents", rapporte l'architecte.

Pour la construction des nouveaux logements, l'agence 3+1 architectes a également consulté les architectes des Bâtiments de France. "Nous avons convenu que nous ne réaliserions pas de bâtiments avec des toitures similaires aux anciennes maisons et avons décidé de partir sur des toitures plates", nous explique Valérie Flicoteaux-Melling. Elle ajoute : "mais nous avons conservé l'idée que les maisons n'étaient pas isolées". Construites sur un site classé, les nouveaux logements reprennent des codes symboliques de l'architecture de la Cité. "La hauteur des bâtiments est liée à celle des maisons existants et les fenêtres, rives de toitures s'alignent à celles des bâtiments anciens", souligne l'architecte. De la même façon, le travail des couleurs s'est prolongé. Ces références à l'architecture d'origine relient ainsi les deux programmes et créent une cohérence d'ensemble.

Pour des questions de performances thermiques, il a été décidé qu'elles bénéficieraient d'une implantation bioclimatique nord-sud. Le bailleur social précise que "les prestations ont été conçues dans le respect de l'environnement et répondent aux exigences du label BBC* (Bâtiment Basse Consommation), qui garantit une faible consommation énergétique". Pour tenir l'équilibre budgétaire du projet, le choix a été fait de construire des bâtiments en bois légers ne nécessitant pas de fondations profondes et coûteuses. De la même manière, aucune source d'énergie renouvelable n'a été installée. "Nous avons donc réalisé un important travail sur l'enveloppe", complète l'architecte.

Réhabilitation de la Cité du Château Maîtrise d'ouvrage : ICF Habitat Nord-Est Architecte : 3+1 architectes, Valérie Flicoteaux-Melling J.C. Vaillant architecte associé Pierre Marchand architecte du Patrimoine Paysagiste : Paule Green Structure : BIIC - BET Structure Bois : TECKICEA - BET Budget : environ 116.000 € par maison

Constructions neuves de la Cité du Château:

Maîtrise d'ouvrage : ICF Habitat Nord-Est Architecte : 3+1 architectes, Valérie Flicoteaux-Melling Entreprise générale : Eiffage construction Paysagiste : Paule Green BET Structure Bois : Teckicea Economiste de la construction : CB économie BET Thermique : AI Environnement BET Fluides : SNC Lavalin BET VRD : A7 aménagement Entreprise cotraitante : Charpente Houot