Faut-il craindre l'obsolescence programmée dans le bâtiment ?

    Publié le 19 mars 2015 par C.L.
    Logements neufs - AI environnement
    Logements neufs - AI environnement © AI Environnement
    Des voix s'élèvent ces derniers temps pour alerter sur un phénomène bien connu dans le secteur de l'électroménager, mais qui pourrait bientôt toucher le bâtiment : l'obsolescence programmée. A la différence qu'elle y serait involontaire. Explications avec Paul-Etienne Davier, gérant du cabinet de conseil et d'ingénierie AI Environnement.
    "Assiste-t-on à l'émergence d'une obsolescence programmée dans le bâtiment?". La question, posée par AI Environnement, interpelle. On connait ce phénomène, qui consiste à planifier volontairement une désuétude ou un taux de remplacement rapide pour un équipement, surtout dans le domaine de l'électroménager, voire de l'automobile. En revanche, on ne l'imaginait pas forcément touchant le secteur du bâtiment.

    Des mouvements contradictoires

    Et pourtant. Il risque d'apparaître d'ici à quelques années, à la différence que, pour le gérant de ce cabinet de conseil et d'ingénierie, Paul-Etienne Davier, cette obsolescence consisterait plutôt à involontairement concevoir des bâtiments selon des critères de performance qui peu après leur livraison seront dépassés. Et de s'expliquer : "Deux mouvements de fond contradictoires agitent le monde de la construction de manière plus prononcée depuis un an : d'un côté la Directive européenne 2010-31-UE annonce que d'ici au 31 décembre 2020, tous les nouveaux bâtiments seront à consommation énergétique quasi nulle ; de l'autre, la récente prolongation de trois ans de la RT 2012 logements collectifs de 57.5 kwh/m2.an au lieu de 50 kwh/m2.an jusqu'au 1er janvier 2018".
    Conséquence : un bâtiment tout juste RT 2012 conçu en 2018 et livré après 2020 sera 25% moins performant qu'un BBC 2005 livré en 2010, selon la modification de la SHON RT et des zones climatiques. "Comment imaginer que ce bâtiment conçu en 2018 ne soit pas déjà désuet par rapport à ses contemporains de 2020 qui devront être à énergie positive ?", s'interroge donc Paul-Etienne Davier. Qui prévient qu'en 2020, le Bepos dopera un phénomène d'obsolescence d'origine réglementaire, mais également architecturale, technique, économique et sociologique...

    Généraliser les standards et aller au-delà des exigences actuelles

    Quelles solutions dès lors pour jongler avec ces problématiques ? "Il faut tenir compte de l'importance du coût d'exploitation, insiste le gérant d'AI Environnement. Et ne plus transiger avec la basse énergie, et donc aller au-delà de la loi". En résumé, faire que la basse énergie, voire l'énergie positive, devienne un standard généralisé, ce qui réduira les prix du marché. "C'est la généralisation d'un standard qui fait que ce standard obtient un prix correct", souligne-t-il. Mais il regrette la politique des "petits pas" qui prévaut en France : on a tendance à procéder par étapes, on crée à chaque fois de nouvelles méthodes, alors qu'il vaudrait parfois mieux adopter des démarches plus radicales. "Au lieu d'introduire dès à présent, et à coût maîtrisé, les méthodes constructives de 2020, nous continuons à jongler avec des modes constructifs en partie dépassés techniquement et ce jusqu'au dernier moment. Est-ce quelque chose de sain pour les acteurs économiques pour une transition énergétique sereine dans la construction ?", assène-t-il.
    Avant de conclure : "La loi de Transition énergétique est un cap ambitieux et positif pour le pays, elle est une lecture positive de l'avenir. Il faut donc fixer un cap clair et ne pas remettre en question ni cette loi ni la RBR 2020".
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