Alors que dans moins d'un an, toutes les habitations, neuves et existantes, devront être équipées d'au moins un détecteur de fumée, il semble que les Français tardent à s'équiper. Résultat : le taux d'équipement n'arrive pas à dépasser 10%. Pourquoi une telle stagnation alors que l'utilité des DAAF a depuis longtemps été prouvée ? Décryptage.
A l'heure actuelle, seuls 10% des logements sont équipés de détecteurs de fumée. Un chiffre qui n'arrive pas à décoller et qui reste très faible par rapport aux autres pays européens puisqu'en Norvège, on atteint 98%, 89% au Royaume-Uni et 65% au Pays-Bas. De quoi susciter un étonnement de la part de la Fédération française des métiers de l'incendie (FFMI) et de nombreux industriels qui ne comprennent pas l'attitude des Français qui ont pourtant bénéficié d'un délai de cinq ans pour s'équiper.
"Nous avions pensé qu'une tranche massive de la population s'équiperait dès la promulgation de la loi, en 2010, mais force est de constater qu'ils attendent la dernière minute", commente Gaëlle Alloin directrice marketing Europe de Kidde, fabricant de détecteurs. Et d'ajouter :
"cela risque de faire comme avec les éthylotests et les gilets jaunes, il risque d'y avoir une ruée vers les détecteurs au dernier moment".
Le plus paradoxal, c'est que lorsque les Français sont interrogés sur la question, ils sont une majorité à vouloir s'équiper car ils sont convaincus de l'utilité des détecteurs avertisseurs autonomes de fumée (DAAF). Seulement voilà : ils ne passent pas à l'action car ils ont encore une méconnaissance des appareils.
Beaucoup pensent en effet que le dispositif est coûteux et complexe non seulement à installer mais aussi à entretenir. Des idées qui ne correspondent pas à la réalité.
"Les prix ont considérablement baissé depuis la promulgation de la loi, assure Gaëlle Alloin.
Aujourd'hui, on trouve des premiers prix à environ quinze euros contre près de vingt il y a encore deux ans. Et concernant l'installation, poursuit-elle,
il ne faut pas croire, comme ont tenté de le faire croire certains individus malveillants, que la mise en place d'un détecteur est longue ou compliquée. Elle est à portée de tous puisqu'il suffit d'enfoncer deux chevilles dans le plafond et ne prend, en tout et pour tout, que dix minutes". "Et pour ce qui est de l'entretien, conclut-elle,
la seule manipulation à prévoir est un changement de piles tous les ans".
La question de l'esthétique revient également souvent sur le devant de la scène. Si beaucoup de Français n'installent pas de DAFF chez eux, c'est en effet parce qu'ils trouvent l'appareil disgracieux. Certains industriels ne sont ainsi lancés dans la fabrication de modèles aux formes plus design et disponibles dans une plus large palette de couleurs pour faciliter l'intégration dans les intérieurs mais sans réel succès commercial à la clé. D'autres, à l'instar de Kidde, joue la carte de la franchise :
"nous travaillons sur l'esthétique mais notre marge de manœuvre est limitée, confie Gaëlle Alloin.
Nous avons, par exemple, essayé de réduire l'encombrement mais il faut savoir que plus l'on réduit la taille de l'appareil, plus sa chambre optique est petite et moins la détection sera efficace".
Autre problème : une majorité plus faible de Français ne se sent tout simplement pas concernée par la question car ils ne savent pas à qui revient la charge d'installer les détecteurs dans les logements.
"Nous aurions aimé que le gouvernement nous apporte son soutien pour mieux expliquer la loi aux particuliers et ainsi dissiper les flous qui persistent", déplore Gaëlle Alloin.
"Pour être francs, nous nous sentons un peu seuls", ajoute-t-elle.
Pour l'heure en effet, l'Etat n'a lancé aucune campagne spécifique sur le sujet. Une position bien différente de celle du gouvernement britannique qui, lui, diffuse régulièrement et à grande échelle des messages de sensibilisation et d'information auprès de la population. Des efforts qui payent puisque près de 90% des habitations sont aujourd'hui en conformité avec la loi.
Reste, enfin, le volet des éventuelles sanctions imposées à ceux qui ne se seraient pas équipés de DAFF en mars prochain. La loi dit seulement que l'installation doit être notifiée à l'assureur avec lequel a été conclu le contrat garantissant les dommages d'incendie. Or, jusqu'ici, les assureurs n'ont pas indiqué quelle serait leur attitude par rapport à leurs assurés concernant l'installation ou non de DAAF. Une prise de position attendue autant que celle du gouvernement.
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