Parmi les problématiques environnementales de l'habitat, celle de la qualité sanitaire du logement ne doit pas être négligée : c'est tout l'objet d'un livre blanc remis le 17 février dernier à l'Assemblée Nationale, qui souligne la corrélation entre l'augmentation des maladies respiratoires et la présence d'humidité et moisissures.
Selon une étude de l'Observatoire de la qualité de l'air intérieur, 40% des logements en France sont contaminés par l'humidité et les moisissures. L'un va d'ailleurs souvent avec l'autre... Des présences néfastes à plus d'un titre, qui ont notamment des conséquences établies sur la santé. Un Livre Blanc* remis le 17 février à l'Assemblée Nationale, souligne ainsi la
"corrélation entre l'augmentation des maladies respiratoires (le nombre d'asthmatiques a doublé en 20 ans) et la présence d'humidité et de moisissures". Des médecins, des personnalités du monde politique, du bâtiment et des associations expriment de fait dans ce livre
"l'urgence de construire sain".
Une relation de cause à effet établie pour les pathologies respiratoires
Le professeur Frédéric de Blay, de l'Unité de Pneumologie, d'Allergologie et de Pathologie respiratoire de Strasbourg, l'un des contributeurs, rappelle ainsi qu'au cours des
"dix dernières années, de nombreuses publications ont rendu compte du rôle délétère des moisissures sur la santé respiratoire, à la fois en raison de leur potentiel allergénique mais aussi par les substances pro-inflammatoires non spécifiques qu'elles peuvent libérer". "La présence d'odeur de moisi augmenterait le risque d'asthme de plus de deux fois", rappelle le spécialiste dans le livre, citant une étude prospective qui a suivi 1984 enfants de 1 à 7 ans. Et de souligner également le potentiel de danger pour les personnes déjà fragilisées : "
Sachant que 30% de nos concitoyens sont allergiques, le nombre de personnes à risque de développer une pathologie en rapport avec les moisissures est important." Le professeur Denis Charpin, chef de service de pneumologie à l'Hôpital Nord de Marseille renchérit sur le facteur de risque majeur de moisissures que représente l'humidité dans les logements, rappelant également plusieurs études médicales autour de l'impact de la moisissure sur le développement de pathologies, notamment respiratoires, différentes selon le type de dégradations observées.
Une contamination des matériaux
Pour Bertrand Delcambre, président du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB), l'urgence sanitaire est d'autant plus importante que, depuis les années 70, politique d'économie d'énergie - avec pour corollaire le confinement des bâtis - et développement d'électroménager générateur de vapeur (comme les sèche-linge) ont entraîné une augmentation de l'humidité propice, là encore, à la prolifération des micro-organismes. Et cette
"contamination fongique des environnements intérieurs est préoccupante car mise en cause non seulement dans la survenue de diverses maladies respiratoires, mais aussi la biodégradation des matériaux." Parlant de
"colonisation fongique du bâti", l'expert souligne ainsi les redoutables effets des moisissures sur l'habitat dans sa structure même, dans laquelle elles trouvent aussi leur "
alimentation".
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Une contamination des matériaux
Initiatives - Logement : attention aux moisissures !
Mérules - champignons © DR
Le Livre donne également la parole et démontre leurs apports, aux acteurs d'initiatives visant à améliorer la qualité sanitaire des bâtis et lutter contre la pollution intérieure : de la mise en place d'audits environnementaux, aux déplacements à domicile de "
conseillers médicaux en environnement intérieur".
Sont cités par exemple, l'expérience du "Laboratoire d'hygiène de la ville de Paris" et la création récente en son sein d'une "Cellule de conseil en santé et environnement intérieur". Le CSTB de son côté, travaille sur la "
mise au point d'outils de surveillance, d'alerte et de diagnostic des espaces clos vis-à-vis des moisissures, l'élaboration d'actions de gestion pour réhabiliter les environnements contaminés, d'outils d'évaluation de la vulnérabilité des produits vis-à-vis de la prolifération fongique ou encore l'élaboration de traitements préventifs innovants des surfaces."
En collaboration avec la Direction générale de la Santé, le CSTB rédige également un guide composé de fiches pratiques
"à l'usage des particuliers confrontés à des proliférations de moisissures dans leur habitat".
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Initiatives - Logement : attention aux moisissures !
En attente de réglementation
En attente de réglementation - humidité © CG-Batiactu
Tous les contributeurs de ce livre blanc - ils sont treize en tout - s'accordent à dire que, même si les pouvoirs publics semblent prendre conscience de l'urgence à agir sur la qualité de l'air intérieur avec, par exemple, la mise en place de l'étiquetage obligatoire pour les produits (article 40 du projet de loi Grenelle I qui prévoit l'étiquetage obligatoire des matériaux de construction à partir de 2012, notamment sur leurs émissions et contenus en polluants volatils), les efforts doivent continuer, voire s'accentuer, notamment dans l'évaluation de l'impact des matériaux sur l'environnement intérieur, l'information du grand public et le développement de solutions pour limiter toujours plus les risques de moisissures. Philippe Richer, sénateur du Bas Rhin, président du Conseil national de l'Air rappelle ainsi que "
La lutte contre les moisissures repose sur une bonne conception du bâtiment et notamment l'absence de ponts thermiques importants. Dans ce cadre, la réglementation pourrait permettre d'informer les habitants et les prescripteurs sur les matériaux et les solutions techniques qui se prêtent le moins à la croissance fongique".
Une réglementation qui répondrait également à une attente des Français, en manque d'informations concrètes : "
Si de récentes campagnes ont particulièrement insisté sur l'aération avec succès (68% des Français jugent le mode de vie très important pour la qualité de l'air) 9 français sur 10 estiment que mode de vie, entretien du domicile, aménagement intérieur mais aussi structure du bâtiment, ont un rôle important pour la qualité de l'air intérieur" précise le sondage réalisé en 2008 par l'Ifop pour la Fédération française des tuiles et des briques (FFTB) placé en annexe du Livre blanc.
Faut-il le rappeler ? Cette problématique ne concerne pas que la France : d'après les dernières statistiques délivrées par Eurostat, 15,9% des maisons ou appartements en Europe, sont affectés par une fuite de toiture ou de l'humidité.
En attente de réglementation