Panneaux solaires © Grégoire Noble
Un nouveau composant de panneaux photovoltaïques vient bouleverser le monde de l'énergie solaire. Les pérovskites, très performants, pourraient - à terme - remplacer le sacro-saint silicium. Des scientifiques du CNRS ont même démontré l'étonnante capacité de ces cellules à s'auto-réparer au cours de la nuit. Détails.
Les cellules photovoltaïques évoluent lentement mais sûrement. Les chercheurs évaluent différentes solutions techniques et notamment celle consistant à utiliser des pérovskites hybrides, des matériaux à structure cristalline commune à de nombreux oxydes qui comprennent des composants organiques et inorganiques.
Le plus intéressant d'entre eux, CH3NH3PbI3, présente d'intéressantes caractéristiques, découvertes en 2012, qui lui permettent d'atteindre des rendements de conversion (presque) identiques aux cellules solaires les plus performantes (celles dopées à l'
arséniure de gallium), soit plus de 22% (c'est-à-dire que 22% de l'énergie solaire est convertie en courant électrique) contre 25,6% de record pour le silicium.
Son efficacité serait liée au fait que les porteurs de charge circulent plus longtemps dans les cristaux de pérovskites, permettant ainsi plus d'échanges de charges au sein du capteur solaire.
Pérovskite © R. Lavinksy - iRocks.com
Daniel Lincot, le directeur de l'Institut de recherche et développement sur l'énergie photovoltaïque, dévoile : "
Les cellules réalisées par Graetzel et Snaith ont atteint, dès leur apparition en 2012, et sans optimisation, les meilleures performances parmi les technologies émergentes".
Des cellules qui se dégradent vite mais se réparent seules
Mais, jusqu'à présent, ces cellules à structure pérovskite présentaient un énorme inconvénient : une dégradation rapide et irréversible, liée à la présence de nombreux défauts et grains. Des équipes de chercheurs américains étaient déjà parvenues à améliorer la qualité cristalline du matériau, repoussant peu à peu la dégradation du rendement photovoltaïque à des échelles de l'ordre de l'heure.
Aujourd'hui, ce phénomène est même en passe d'être jugulé : en effet, des scientifiques de l'Institut des sciences chimiques de Rennes et du laboratoire Foton (
CNRS) associés à plusieurs équipes américaines, ont mis en évidence un mécanisme d'autoréparation des cellules photovoltaïques, dans le noir.
Selon les chercheurs, l'accumulation lente (pendant plusieurs heures d'exposition au soleil) de charges électriques piégées dans les déformations du réseau cristallin, perturberait le flux continuel des porteurs de charges libres produites par l'effet photovoltaïque. L'évacuation de ces zones chargées dans le matériau permettrait de réparer rapidement les dégâts causés par les rayons solaires - en moins d'une minute dans l'obscurité - ce qui ouvrirait la voie à la mise au point d'un démonstrateur industriel.
Car, en plus de la bonne mobilité des charges électriques, les cellules pérovskites présentent d'autres avantages comme une bonne absorption de la lumière solaire, la possibilité de les manipuler sous forme d'encre apte à être appliquée sur de grandes surfaces ou un coût de fabrication peu élevé.
Daniel Lincot tempère : "
Les pérovskites ont apporté un élan considérable à la communauté photovoltaïque et sont encore pleines de promesses, mais elles se heurtent également à des verrous très importants, comme leur piètre stabilité ou leur mauvaise résistance à l'eau... Par ailleurs, les records sont réalisés sur des démonstrateurs de quelques mm2 de surface. Il reste de nombreuses années de recherche, même si l'intérêt des entreprises du secteur est déjà très fort".
La prochaine étape des recherches consistera à apporter la preuve expérimentale définitive de l'hypothèse avancée par les chercheurs français. Ils pourront ainsi proposer de nouvelles stratégies au niveau de l'architecture des cellules afin de lever la limitation intrinsèque des pérovskites.
Les premières cellules pérovskites pourraient être disponibles commercialement dès 2017. L'énergie solaire aurait-elle trouvé son Graal ?