Relever son compteur électrique pour une facturation précise de sa consommation d'énergie © iStock
Le rapport annuel du médiateur de l'énergie pointe du doigt des pratiques douteuses, des offres commerciales trompeuses, et un nombre de litiges en forte hausse. En cause notamment, l'ouverture du marché à la concurrence. Analyse.
Fausses promotions, énergies "vertes" pas si respectueuses de l'environnement, méthodes douteuses et offres trop alléchantes, le monde des fournisseurs d'énergie serait-il impitoyable... pour les consommateurs ? Le rapport annuel du médiateur de l'énergie jette un doute sérieux sur l'honnêteté de certains opérateurs fournissant électricité et gaz naturel.
Le document, rendu public le 14 mai 2019, affiche un constat accablant :
le nombre de litiges a augmenté de 38% en 2 ans. 16.000 personnes ont saisi le médiateur, aboutissant à 5.000 médiations environ. Si toutes les catégories de litiges connaissent un accroissement, les médiations relatives à un problème de facturation (erreur sur la somme à payer, règlement non pris en compte, etc.) flambent, à +60% par rapport à 2017.
En cause, selon Jean Gaubert, actuel médiateur national de l'énergie :
l'ouverture du marché, en 2007. Les opérateurs sont en effet pointés du doigt par le rapport, notamment pour leur facturation "
erratique", les problèmes liés aux
relevés de compteurs, ainsi que les
rattrapages de consommation de plus de 14 mois qu'ils imposent à leurs clients - pratique tout bonnement illégale.
Les mauvaises pratiques pullulent La concurrence, un bénéfice tout relatif ? Le médiateur met un bémol sur l'intérêt évident de l'ouverture du marché, passé de 8 fournisseurs en 2007 à 31 en 2018. Il alerte sur la course aux distinctions (service clients de l'année, prix du meilleur fournisseur, etc.) mais aussi sur l'
utilisation abusive de termes flous ou inexacts ("
mandaté par l'Etat", mention d'une "
loi Hulot" qui n'existe pourtant pas, etc.) ou encore sur l'
usurpation d'identité de commerciaux se faisant allègrement passer pour des employés venant relever les compteurs.
Les
démarchages connaissent également un boom qui agace nombre de consommateurs, puisque plus de la moitié d'entre eux disent avoir été démarchés par téléphone ou directement chez eux. Les personnes âgées sont particulièrement concernées et ciblées par certains opérateurs malveillants.
Des tarifs faussement avantageux et des erreurs de facturationAutre pratique douteuse récurrente : les promotions pas si avantageuses.
Imprécision, erreur ou arnaque, de nombreux clients se disent floués et sollicitent une médiation. Parmi les offres sources de litiges, celles à "prix fixe" qui ne précisent pas que le prix de l'abonnement, lui, est susceptible de changer ; celles qui annoncent un rabais exagéré ; ou encore, celles dont les frais de résiliation ne sont pas toujours indiqués.
La consommation, et notamment
la facturation sur des estimations de consommation, est l'une des sources principales de litiges, sans surprise : 2.443 cas en 2018, contre 2.105 l'année précédente. Là encore, les anomalies foisonnent : double facturation, erreur dans les prélèvements mensuels, ou même erreur sur le tarif appliqué ! Jean Gaubert rappelle que dans de très nombreux cas, la médiation a permis de rétablir rapidement la situation et de recouvrer les sommes injustement perçues.
Des litiges mal gérésEnfin, le médiateur regrette qu'en cas de litige, les
procédures légales ne soient pas toujours respectées par certains fournisseurs : délais de mise en service, ou de rétablissement d'une situation liée à une erreur de compteur, résiliation inexpliquée dont la société ne cherche pas l'origine,
coupure inopinée sans prévenir le client, etc. Autant d'agissements délétères que Jean Gaubert dénonce vivement.
Une lueur d'espoir, tout de même, dans ce portrait particulièrement sombre du marché. Deux tiers des Français savent à présent qu'ils peuvent
changer de fournisseur d'énergie, une proportion en nette progression.