A l'origine de la réalisation, une volonté de profiter des 40 hectares de terrain en Corrèze possédés par les parents de l'architecte, eux-mêmes maîtres d'œuvre du chantier. Problème, la zone constructible est une zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique (ZNIEFF). L'emplacement qui était un des atouts, est donc devenu au moment du chantier un obstacle au permis de construire. Heureusement, les communes voisines, ainsi que le Conseil régional, ont tenu à soutenir le projet via le vote d'un nouveau plan local d'urbanisme (PLU).

"Les caractéristiques du terrain ont imposé leurs propres contraintes" explique Apolline Terrier pour justifier l'emplacement des cabanes. "La terre étant sablonneuse et les arbres trop peu solides pour soutenir une telle structure, il a fallu réfléchir très vite à la façon d'installer les cabanes" ajoute-t-elle. Le choix s'est donc porté sur des pilotis pour concevoir des cabanes à l'image des "postes de guet". D'autant que cette décision réglait aussi le problème de la pente à plus de 45 degrés. Ces contraintes ont également touché l'entreprise Gouny, qui a aidé l'architecte pour toute la partie gros œuvre. Ainsi, la société a fait appel à des engins spéciaux pour apporter les cabanes pré-assemblées, le montage se faisant sur place.

La dimension écologique du projet n'est pas uniquement présente dans l'environnement, elle l'est aussi dans les technologies utilisées pour le fonctionnement des cabanes. En effet, en cumulant une excellente isolation en chanvre et mélèze, et un système d'assainissement révolutionnaire, les Cabanes de Salagnac ont obtenu le label haute qualité environnementale et sont en passe de recevoir le label "Clef verte". "Nous sommes en mesure de proposer aujourd'hui des logements à énergie passive" affirme ainsi Apolline Terrier. "Nous avons installé des sèche-serviettes de 1.500 W comme unique source de chauffage, mais c'était surtout pour rassurer les visiteurs."

Des toilettes de navette spatiale

Concernant l'assainissement, le dispositif de la marque "ultraepur" est quasiment unique puisqu'il n'a été utilisé que dans des navettes spatiales jusqu'alors. Il permet de réutiliser la totalité des eaux usées du logement, sans avoir besoin de système d'épandage. Assez peu connue, cette solution a été suggérée directement par le Conseil régional.

Si les six cabanes ne peuvent se différencier de l'extérieur (hormis la dernière, décloisonnée et réservée aux personnes à mobilité réduite), il existe cependant trois types d'aménagement intérieur pour celles-ci. Ainsi, deux cabanes ont des intérieurs en cèdre blanc, deux en cèdre gris et une cabane est en pin blanc. "Chaque décoration est adaptée à la couleur des murs" ajoute l'architecte. Il aurait été possible de créer des cabanes de tailles et de formes différentes, mais "le budget aurait été beaucoup plus important et cela allait également à l'encontre de ma démarche". Un budget qui s'élève déjà à 70.000 euros par cabane et presque un million d'euros en comptant la totalité du projet.

Pour justifier cette omniprésence du vert et du blanc dans les cinq cabanes, Apolline Terrier reconnait s'être "inspirée du principe des carreaux noirs et blancs de Putman. J'ai choisi le vert et blanc parce que le vert est une couleur vive, en adéquation avec le projet." Comme un code couleur, les carreaux verts et blancs sont donc présents dans les logements : la salle de bains, la cuisine au niveau de la crédence, etc.

On retrouve du vert également dans la décoration et les accessoires, ce qui donne au tout une ambiance "années 50". "J'aime énormément chiner dans les brocantes et je pense qu'avec cette décoration, j'ai réussi à concilier un côté retro au niveau de la déco et moderne, en termes d'architecture" estime l'architecte.

Si les cabanes de Salagnac sont isolées dans une nature verdoyante, ce n'est pas pour autant que les propriétaires souhaitaient priver leurs occupants de tout le confort technologique habituel. "Il était hors de question d'installer des toilettes sèches, par exemple" note l'architecte, peu convaincue par ce type de W.C. Concernant l'équipement, une machine à café dernière génération, le Wi-fi, une télé à écran plat et une douche à l'italienne, composent la majeure partie des technologies présentes dans les cabanes. Les cabanes se veulent comme un endroit de repos auprès de la nature, "mais pas nécessairement coupé du monde" nuance Apolline Terrier.

Située en amont des autres cabanes, la cabane d'accueil est un petit point de repos où peuvent se reposer les visiteurs auprès d'un poêle en bois. Egalement pensé comme un lieu d'échange entre les différents occupants des cabanes, l'accueil va bientôt être modernisé selon l'architecte.

Plutôt fiers du résultat, les propriétaires annoncent une fréquentation de 220 nuitées depuis l'ouverture en mai 2013. La concrétisation du projet ayant pris trois ans (dont deux pour les analyses uniquement), ils ne souhaitent pas entamer de nouveaux et longs travaux dès maintenant. Même si la possibilité d'une cabane familiale pouvant accueillir jusqu'à 4 enfants - "principalement pour des familles recomposées au vu du nombre de demandes reçues" explique l'architecte - est actuellement en discussion.