Un "dilemme". L'histoire de l'exposition "Villes rêvées, villes durables ?", jusqu'au 7 mars 2010 à l'Espace Fondation EDF*, est celle d'un dilemme, formé de paradoxes et de contradictions. Face à face, les désirs des particuliers, a priori inconciliables, d'accéder à la possession d'une maison individuelle avec jardin et en même temps, de vivre en ville et de profiter ainsi des avantages d'accès à des multitudes de services. En plus de ce premier paradoxe, la cerise sur le gâteau des urbanistes revient à la nécessaire conciliation par les pouvoirs publics des problématiques environnementales et sociales actuelles, "mobilité, gestion des déchets et de la pollution, créations de logements sociaux, maîtrise de la consommation d'énergie et de l'eau..." pour ne citer qu'elles. Comment imaginer la ville aujourd'hui ? Peut-on concilier ces désirs et rêves de tout à chacun tout en préservant notre environnement ? Ces questions, qui constituent le fondement même de leur profession, les deux urbanistes Eric Charmes et Taoufik Souami, les posent de manière admirable aux visiteurs de l'exposition. En leur donnant les clés nécessaires à la compréhension, ils leur offrent ainsi la possibilité de prendre eux-mêmes part à ce débat qui les concerne au premier chef : comment construire des villes durables ?

La ville à la campagne

Différentes réponses ont été abordées au fil du temps. L'on a d'abord cru pouvoir mettre la ville à la campagne, en multipliant les zones pavillonnaires en périphérie des grandes villes. Une solution "entre rêve et cauchemar", expliquent les auteurs dans l'introduction du hors-série découverte Gallimard publié à l'occasion de l'exposition. Confort domestique et environnement plus sain pour la famille, mais souci de transports, coût élevé des déplacements, hausse de la pollution due à ces mêmes trajets, réalisés souvent en voiture... "Les citadins qui vont s'installer dans un cadre verdoyant en périphérie des villes apparaissent aujourd'hui comme des menaces pour la ville durable, que ce soit en termes économiques, environnementaux ou sociaux." Et d'ajouter, "le rêve du XXe siècle semble être devenu un cauchemar".

La question de la densité en débat

 Autre option abordée actuellement, "refaire la ville sur la ville". Mais la ville dense est-elle durable ? La concentration permet de réduire l'usage de la voiture, la consommation d'espace, d'eau et la production de déchets... Eric Charmes et Taoufik Souami rapportent les travaux de plusieurs études récentes qui tendent à une re-densification des villes pour préserver au maximum l'environnement. "D'après ces études, expliquent-ils, la densité la plus protectrice de l'environnement serait une densité intermédiaire, suffisamment élevée pour faire vivre des commerces de proximité et permettre une desserte en transports collectifs et, suffisamment basse pour que les citadins ne ressentent pas le besoin de prendre l'air le week-end." Mais la densité elle-aussi a de non négligeables inconvénients... suscitant encore de nombreux débats. "Il reste donc à imaginer des formes urbaines et des organisations de la mobilité qui permettent à tous les citadins d'accéder aux centres urbains à partir de l'habitat de leur choix et selon leurs désirs", concluent les auteurs.

Une exposition à voir, un livre à lire

Cette exposition richement illustrée, comme ce hors-série Découverte Gallimard associé, nous entraîne ainsi tout à tour dans les villages pavillonnaires, dans les barres d'immeubles toujours plus hautes des villes, dans les nouveaux coeurs urbains, au sein des rêves les plus fous de villes vertes... Une fois compris que "la somme des désirs individuels ne conduit pas nécessairement à une ville idéale pour tous", reste à imaginer notre ville, notre rêve accessible.