Le chantier de rénovation est de taille : des appartements sur cinq étages et... un kilomètre de long. Le Serpentin est l'un des ensembles de logements sociaux emblématiques de Pantin (Seine-Saint-Denis), de par son ampleur et sa forme singulière. C'est l'architecte Emile Aillaud qui a développé cette "forme biologique" en 1954 autour d'un grand parc paysager de 4 hectares, dans le quartier des Courtilles qui comprend, en outre, les 16 tours en forme d'étoiles du Pont de Pierre, du même architecte, ainsi que plusieurs bâtiments publics. Alors que les tours du Pont de Pierre ont déjà été rénovées, la réhabilitation du Serpentin est un dossier qui a pris du temps. Après plusieurs années d'études et l'intervention de l'architecte des Bâtiments de France, le chantier a finalement débuté en 2009 sous la direction de GTM avec les architectes de l'agence RVA. Les habitants sont relogés dans les appartements rénovés au fur et à mesure que le chantier avance le long du Serpentin, où les logements sont refaits par tranches de cent environ. Des 635 appartements d'origine, 613 seront habitables à la fin des travaux : il a en effet été décidé de percer une partie du Serpentin en démolissant quatre bâtiments, afin de mieux l'ouvrir sur l'extérieur, et de relier ce quartier à la place du marché pour lui donner "une plus belle continuité urbaine". A l'intérieur, la distribution des logements a été repensée, et les énergies renouvelables s'invitent dans la rénovation puisque le solaire et la géothermie ont été choisis pour le chauffage, l'eau chaude sanitaire et l'éclairage des parties communes afin de faire baisser les charges locatives. Côté matériaux, la terre cuite et le basalte ont été adoptés "car la structure en parpaings du Serpentin reste très fragile", explique Nicolas Trentesaux, architecte urbaniste de l'agence RVA. Autres changements notoires, les entrées des caves, autrefois accessibles des deux côtés des bâtiments, seront bouchées pour conférer plus de sécurité, et l'accès se fera via les halls. Quant aux quatre hectares entourés par le Serpentin, ils ont vocation à devenir un parc urbain.

Festival de couleurs

A l'origine, le Serpentin arborait des couleurs bleu ciel à l'extérieur, et rose à l'intérieur, qui ont mal vieilli. Le premier projet des architectes proposait de recouvrir les façades dégradées d'une vêture en terre cuite. Mais ce projet a finalement été rejeté par l'architecte des Bâtiments de France, arguant qu'il dénaturerait l'œuvre d'Emile Aillaud. C'est pourtant l'architecte qui, de son vivant, avait donné son accord dans les années 80 pour que les tours en forme d'étoile qui bordent le Serpentin soient recouvertes de briques. Finalement, c'est une mosaïque de plus de 22.000 m2 en pavés de verre qui a été retenue pour la façade. Le côté extérieur offrira un camaïeu de bleu et gris, alors que les façades intérieures présenteront un assortiment de couleurs variées, toujours en mosaïque. Sécurité oblige, la tôle visible de l'extérieur sur les cages d'escaliers sera remplacée par des vitres pare-flammes, comme pour les tours en étoile. Chaque hall sera peint d'une teinte différente, qui transparaîtra à travers les vitrages verticaux des cages d'escaliers lorsque les halls seront éclairés, pour donner, à la nuit tombée, un aspect de kaléidoscope au Serpentin.