A Montpellier, les archi-stars se partagent la vedette

    Publié le 10 octobre 2013 par Céline Galoffre
    Ricardo Bofill, Jean Nouvel, Zaha Hadid, Paul Chemetov... Montpellier collectionne les grands noms de l'architecture et affiche sa singularité. Visite et interview exclusive de la maire, Hélène Mandroux.
    Aspergés par les jets d'eau de la principale place du quartier Antigone à Montpellier, les enfants sont heureux de pouvoir s'amuser sur cette esplanade piétonne. Un succès et un plébiscite qui s'étendent jusqu'aux riverains, contents de pouvoir se détendre aux terrasses des cafés situées aux pieds des immeubles.
    Une synergie qui n'était pourtant pas gagnée d'avance. Car Antigone, projet mené par le Catalan Ricardo Bofill à la fin des années 70, est un ovni en matière d'urbanisme. Un véritable parti pris impertinent. Avec ses bâtiments inspirés de la Grèce antique, ce surprenant programme a néanmoins su s'imposer au fur et à mesure comme une figure de proue du renouveau de la ville. Il a même donné le coup d'envoi à la vaste ambition architecturale portée par l'ancien maire Georges Frêche. Du polygone (NDLR : centre commercial) aux rives du Lez, la métamorphose est aujourd'hui considérable. Et pour accompagner ces changements, la ville a choisi de faire appel à des pointures de l'architecture. Rien que dans le petit périmètre d'Antigone, se côtoient la bibliothèque de Paul Chemetov, la piscine de Ricardo Bofill et, à quelques centaines de mètres, a été inauguré en 2011 l'imposant hôtel de ville signé notamment par la star française de l'architecture, Jean Nouvel. Et des stars, Montpellier n'en manque pas. Elles rivalisent même de créativité et d'ingéniosité.

    Des audaces architecturales

    Parmi les réalisations symboliques, on peut citer le Corum, palais des congrès de la ville érigé en 1990 par Claude Vasconi. Loin de faire l'unanimité au départ, notamment en raison de son coût, il est aujourd'hui un lieu incontournable accueillant des opéras, des ballets ou des concerts lyriques. Plus récemment, l'anglo-irakienne Zaha Hadid a livré les Archives municipales situées dans un quartier populaire de la ville à la jonction de la Pailade, Alco, Malbosc et Celleneuve. Ce bâtiment au design futuriste intègre le projet d'un éco-quartier de 10 hectares. Dans la zone récente de Port-Marianne, c'est l'architecte italien Massimiliano Fuksas qui s'est illustré avec la construction du lycée hôtelier Georges Frêche : "Le bâtiment devait être une vedette pour la région et un lycée haut de gamme avec une architecture très technique", soulignait lors de la présentation de l'édifice, Damon Belusco, architecte en chef pour Fuksas.

    Une ville design plébiscitée

    Autre projet, autre star. Cette fois, c'est une des figures les plus emblématiques du design français qui s'est lancée dans la création d'un bâtiment tertiaire baptisé "Le nuage" installé entre le parc Georges Charpak (ex-parc Marianne) et l'avenue Raymond Dugrand. Avec sa façade en membrane transparente en ETFE (éthylène tétrafluoroéthylène), il devrait surprendre les riverains dès 2014. Et cet esprit audacieux, Montpellier le traduit au-delà même des frontières du bâti puisque l'habillage certaines lignes de tramways ont été griffées par le couturier Christian Lacroix. Dans un autre style, la place du 20ème siècle met en scène dix statues de personnalités politiques parmi lesquels Winston Churchill, Mohandas Gandhi, Charles de Gaulle ou encore Lénine dont l'intégration a été fortement critiquée. Malgré tout, ces choix semblent porter leurs fruits. Ainsi, le New York Times a classé la ville parmi les 45 sites à visiter absolument en 2012. Un titre dont elle peut se targuer puisqu'elle était la seule commune de l'Hexagone à figurer au palmarès. Sur le territoire, elle se hisse au quatrième rang des villes préférées des métropolitains, selon un sondage publié par BVA-Presse en février 2013. Montpellier devrait donc poursuivre sa route et rien ne semble l'arrêter. Pour preuve, l'opération "Folies du 21e siècle" vise à impulser la conception et la réalisation de 12 nouvelles 'Folies' du XXIème siècle tout droit issu de la tradition des "Folies" montpelliéraines du 18e siècle*. Avec ses bizarreries, ses disparités, son centre historique, sa modernité, Montpellier espère une chose : séduire. Reste à savoir si c'est un peu, beaucoup, passionnément ou à la folie !
    * Au XVIIIe siècle, à Montpellier et en périphérie de la ville sont apparues d'élégantes demeures conçues par des architectes locaux, pour des aristocrates ou de grands bourgeois : château de Flaugergues, château de la Mogère, château d'Ô ou encore de la Mosson... Par une architecture et une organisation qui leurs sont propres, ces bâtisses appelées Folies Montpelliéraines ont marqué l'histoire architecturale de la ville et contribuent encore aujourd'hui à son identité. Source : Ville de Montpellier
    A Montpellier, les archi-stars se partagent la vedette

    Interview d'Hélène Mandroux

    Lycée hôtelier Montpellier
    Lycée hôtelier Montpellier © Fuksas
    Pourquoi Montpellier s'est-elle lancée dans des grands chantiers d'architecture ces dernières années ? Pourquoi ces choix ? Les réponses de la maire, Hélène Mandroux.
    Batiactu : Comment est née l'idée de faire de Montpellier une capitale architecturale ? Le quartier Antigone est-il le point de départ ? Quelle est sa genèse ?
    Hélène Mandroux :
    Initié à la fin des années 70, le quartier Antigone marque pour Montpellier le début d'un projet urbain ambitieux : celui de développer la ville vers la mer et reconquérir son fleuve, le Lez. Antigone a été un laboratoire de croissance urbaine. Ce nouveau quartier a vu l'application de tous les principes qui fondent le projet urbain à Montpellier : la mixité sociale et fonctionnelle, la desserte par les transports en commun, la présence d'équipements publics, des espaces publics de qualité, lieux de convivialité, d'animation et de lien social. Antigone marque également le souhait d'innover, avec une version contemporaine du centre historique. C'est aussi une réponse en matière d'habitat pour tous (25 % de logements sociaux, soit plus de 1.000 en cœur de ville et de l'accession libre) avec la même qualité architecturale et une prouesse technique.
    Batiactu : Certains projets sont vivement critiqués, notamment le territoire Antigone parfois défini comme une verrue, que répondez-vous à ces détracteurs ?
    Hélène Mandroux :
    Antigone est la première opération de renouvellement urbain à Montpellier. Elle relevait un véritable défi. Ce fut l'occasion d'élargir le centre, d'amener la ville jusqu'au Lez et de composer l'espace public avec ses places, ses esplanades, ses ouvertures, ses fontaines, son parti pris architectural. Des programmes d'équipements publics se sont intégrés dans cet ensemble : piscine olympique et médiathèque régionale, l'une signée de l'architecte catalan, père d'Antigone, Ricardo Bofill, l'autre dessinée par Paul Chemetov, l'un des plus grands architectes français. Depuis, trois lignes de tramway et deux marchés s'y sont implantés.
    Batiactu : Qu'apportent ces réalisations contemporaines signées par des grands noms de l'architecture à la ville ?
    Hélène Mandroux :
    Inviter des architectes du monde entier qui portent des idées d'humanisme et de partage d'innovations permet de créer une véritable émulation et de développer une expertise en termes de construction urbaine. Ces réalisations contemporaines contribuent également à valoriser la notoriété du territoire et faire de Montpellier une référence en matière d'architecture.
    Elles sont aussi sources de fierté et de mieux-être pour tous les Montpelliérains. L'esthétique des bâtiments publics contribue à l'identité et l'attractivité de la ville et à son appropriation par tous. Enfin, l'exigence environnementale est aussi au cœur de telles constructions car le respect de la biodiversité, des espaces verts et des économies d'énergie... conduit nos choix architecturaux.
    Ces projets, dont l'ambition architecturale est renouvelée en permanence, sont les témoins d'un territoire dynamique, des signaux d'innovation. Ils montrent que la ville va de l'avant et qu'elle est un laboratoire de créativité.
    Batiactu : Que répondez-vous à ceux qui évoquent l'effet marketing de ces choix architecturaux ?
    Hélène Mandroux :
    C'est une évidence : l'architecture est, depuis les années 80, un outil de marketing territorial. Mais les projets sont réels et vont au-delà : l'architecture de qualité est au service d'un projet de ville et de ses habitants. L'architecture est aussi un outil d'attractivité pour attirer les investisseurs, pour stimuler l'attractivité économique et créer de l'emploi et des richesses.
    En faisant des efforts de qualité architecturale, la Ville contribue au mieux-être de tous et s'assure que les immeubles et les quartiers construits conserveront leur valeur dans la durée. Cette architecture innovante n'est surtout pas maniérée ou clinquante, elle se veut simplement belle. Et peut-être qu'en période de crise, c'est un élément encore plus fondamental !
    Propos recueillis par Céline Galoffre
    Interview d'Hélène Mandroux

    Quartier Antigone - A Montpellier, les archi-stars se partagent la vedette

    Quartier Antigone
    Quartier Antigone © CG- batiactu
    Antigone est un quartier imaginé par le Catalan Ricardo Bofill à la fin des années 70. Il s'inspire de la Grèce antique.
    Quartier Antigone - A Montpellier, les archi-stars se partagent la vedette

    Piscine de Ricardo Bofill

    Piscine de Ricardo Bofill
    Piscine de Ricardo Bofill © CG- batiactu
    Dans le quartier Antigone, Ricardo Bofill a signé la piscine.
    Piscine de Ricardo Bofill

    Bibliothèque de Paul Chemetov

    bibliothèque de Paul Chemetov
    bibliothèque de Paul Chemetov © CG- batiactu
    L'architecte Paul Chemetov a imaginé la grande bibliothèque du quartier Antigone. Elle côtoie juste à côté la piscine de Ricardo Bofill.
    Bibliothèque de Paul Chemetov

    La Mairie de Jean Nouvel

    La Mairie de Jean Nouvel
    La Mairie de Jean Nouvel © CG- batiactu
    L'imposant hôtel de ville signé par la star française de l'architecture Jean Nouvel mais aussi par l'architecte François Fontès a été inauguré en 2011.
    La Mairie de Jean Nouvel

    Pierres Vives de Zaha Hadid

    Zaha Hadid
    Zaha Hadid © CG- batiactu
    Le bâtiment Pierresvives signé par l'architecte Zaha Hadid a été inauguré jeudi 13 septembre 2012 à Montpellier. Cette cité des savoirs et du sport, faite de béton et de verre abrite les archives départementales de l'Hérault, la médiathèque départementale, et l'activité physique pour tous avec l'association Hérault Sport. Une construction singulière qui s'inscrit dans l'éco-quartier en cours d'édification alentours qui rassemblera logements, commerces et services, places et jardin public.
    Pierres Vives de Zaha Hadid

    Lycée hôtelier conçu par Massimiliano Fuksas

    Lycée hôtelier conçu par Massimiliano Fuksas - Lycée hôtelier Montpellier
    Lycée hôtelier conçu par Massimiliano Fuksas - Lycée hôtelier Montpellier © Grégoire Noble
    Le nouveau lycée hôtelier de Montpellier, conçu par Massimiliano Fuksas, est une structure complexe, aux multiples courbures, implantée sur un terrain exigu. Les façades en aluminium sont recouvertes d'une multitude de triangles qui en font une œuvre singulière.
    Lycée hôtelier conçu par Massimiliano Fuksas

    Le nuage selon Starck

    Nuage
    Nuage © Starck - Roxim
    Voici l'immeuble "Nuage" designé par Philippe Starck. Un lieu conceptuel qui mélange club de sport et nouvelles attentes des urbains.
    Le nuage selon Starck

    RBC Design center

    rbc design center
    rbc design center © DR
    RBC, spécialiste du mobilier design, a ouvert les portes de son nouvel espace à Montpellier. L'architecte Jean Nouvel a créé ce bâtiment qui est bien plus qu'un simple magasin. Si de nombreux objets et accessoires se déploient sur neuf niveaux, on y trouve également un restaurant branché et une librairie. Et bien sûr le design à tous les étages !
    RBC Design center

    Les folies architecturales

    LNC
    LNC © LNC - Moussavi
    Afin de perdurer l'esprit "Folies" qui s'est établi à Montpellier au 18e siècle, a été lancé le projet des "Folies du 21e siècle". Aux commandes : les Nouveaux Constructeurs (LNC), sous sa marque Dominium et l'agence de Farshid Moussavi ainsi que des jeunes Montpelliérains de Coloco.
    Les folies architecturales
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