Le souhait du prêtre est entendu par la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) de la région Poitou-Charentes qui lance un appel à projets à l'intention des designers. La consigne est de revisiter le mobilier liturgique (autel, ambon et baptistère) afin qu'il soit de nouveau à la hauteur de l'architecture prestigieuse de l'église. Interpellé par le caractère insolite de la demande Mathieu Lehanneur décide d'y répondre. "De tout temps, les églises ont fait appel aux meilleurs savoir-faire pour s'édifier alors pourquoi ne pas continuer dans la même voie aujourd'hui ?", s'interroge-t-il. Il ne tarde pas à rencontrer le prêtre seulement voilà, en discutant avec lui, il se rend vite compte qu'il ne pourra vraiment le satisfaire qu'en dépassant la requête initiale. "Les exigences et l'ambition du prêtre étaient telles que je ne pouvais pas y répondre uniquement par le biais du mobilier", raconte le designer. Du coup, ce qui ne devait être à l'origine que de la conception de mobilier s'est transformé en un projet d'une ampleur beaucoup plus grande.

Un bloc de marbre au relief accidenté

Afin de redonner de l'attractivité au chœur de l'église, Mathieu Lehanneur a eu l'idée de venir y installer un immense podium de 45 cm de haut au relief accidenté et constitué, comme les blocs géologiques, d'une superposition de strates en marbre. Bref, une création résolument contemporaine dans un bâtiment datant du 11e siècle ! "L'idée était de créer un volume afin de donner le sentiment de quelque chose de massif qui préexistait avant la construction de l'église. Le but était aussi de jouer sur les variations de niveaux pour induire des comportements : une pente douce invite à marcher lentement, un renfoncement à s'asseoir...", explique le designer. Suite et fin de l'article en page suivante.

Chargé de s'occuper de la maîtrise d'œuvre, l'architecte a décidé de faire appel à Brocatelle, une marbrerie de bâtiment et de décoration située à Lyon. "Comme la structure a été conçue pour affleurer les colonnes, il fallait que l'entreprise soit capable de rendre un travail extrêmement précis et donc, par conséquent, qu'elle soit vraiment spécialisée dans la découpe de ce matériau", commente Mathieur Lehanneur. Mais avant d'en arriver à la découpe, encore fallait-il trouver le bloc de marbre ! "La tâche n'a pas été simple", se rappelle Alexandra Païta, responsable du projet chez Brocatelle. "Comme Mathieu Lehanneur voulait un bloc d'une extrême blancheur, nous avons préconisé le marbre blanc de Namibie pour sa quasi absence de veine, poursuit Marc Morel, également en charge du dossier. Il donne une belle luminosité au chœur et fait bien ressortir le mobilier en albâtre ambrée".

Installation réversible

Sans surprise, c'est à Carrare, en Italie, que le bloc idéal a été déniché. Il a ensuite été scié en 65 plaques rectangulaires, lesquelles ont été découpées en suivant les gabarits dessinés par le designer. 'En tout, 969 pièces, toutes différentes en forme et en dimension, ont été façonnées. Un véritable travail d'orfèvre !", explique Alexandra Païta. Tous les éléments ont ensuite été assemblés en servant de coffrage en béton et positionnés de manière à pouvoir être retirés sans abîmer le bâtiment. Le cahier des charges imposait en effet à l'architecte de rendre cette installation réversible. Grâce au savoir-faire extrêmement spécialisé de l'entreprise Brocatelle, il est y est parvenu. Aussi incroyable que cela puisse paraître, la structure pourrait en effet tout à fait être désinstallée sans altérer l'édifice roman. Une belle prouesse !

Le prêtre Jacques Lefebvre a choisi de faire appel au designer Mathieu Lehanneur pour rénover le chœur de son église, Saint-Hilaire de Melle, dans les Deux-Sèvres.

Contacté à l'origine simplement pour repenser le mobilier, le designer a imaginé un projet beaucoup plus vaste. Il a imaginé d'installer un gigantesque podium au relief accidenté pour matérialiser le choeur de l'église.

Une fois le bloc de marbre trouvé, l'entreprise Brocatelle a dû le découpé en 969 pièces, toutes de formes et de dimensions différentes.

Les strates de marbre ont été mises en oeuvre en se servant d'un coffrage en béton.

Le résultat final est étonant puisque l'on voit surgir une création contemporaine en plein milieu d'un édifice datant du 11e siècle.

"L'idée était de créer un volume afin de donner le sentiment de quelque chose de massif qui préexistait avant la construction de l'église. Le but était aussi de jouer sur les variations de niveaux pour induire des comportements : une pente douce invite à marcher lentement, un renfoncement à s'asseoir...", explique le designer.

Le podium est composé de strates en marbre blanc de Namibie.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, la structure pourrait être désinstallée sans altérer l'édifice roman. Une belle prouesse !

Le mobilier liturgique (autel, ambon et baptistère) - est en albâtre ambrée.