Ces constructions ont marqué le paysage urbain et symbolisent une époque. Les bâtiments industriels abandonnés font l'objet d'une exposition photo à Paris. De Leipzig à Detroit, Romain Meffre et Yves Marchand sont entrés dans ces édifices dont on ne connaît souvent que la façade, et racontent l'architecture industrielle à travers le temps et l'histoire. Visite.
Des entrepôts à l'abandon où l'on voit pousser la mousse sur le sol, dans les fissures du béton. Une ancienne centrale électrique où s'entremêlent tuyaux de toutes tailles et tableaux de bord géants avec des boutons à perte de vue. L'exposition «Industria : ruines industrielles» rappelle le sentiment qu'ont les enfants qui pénètrent dans un bâtiment abandonné, un lieu interdit. D'ailleurs, l'histoire commence à peu près comme ça…
«J'ai toujours aimé l'architecture, et les bâtiments historiques ont quelque chose à raconter» , confie Romain Meffre.
«A la base, nous avions un intérêt pour les lieux abandonnés en général, un vieux fantasme de gamins» , raconte Yves Marchand. Mais les usines et autres bâtiments industriels en friche ne font pas vraiment l'objet d'un recensement officiel. Les deux photographes fréquentent les mêmes sites internet recensant ces lieux oubliés, et commencent à travailler ensemble.
Romain et Yves ont traîné leurs appareils photos dans le nord de la France, en Belgique, en Italie, dans l'est de l'Allemagne, au Canada et aux Etats-Unis. «
A force de visiter ces friches industrielles, on finit par se faire un œil sur les volumes, on comprend un peu mieux les styles architecturaux de l'époque.» Ils observent les différences culturelles et historiques jusque dans la manière de conserver ou abandonner ces lieux magiques.
«Par exemple, en Allemagne de l'Est, tout ce que nous trouvons est à l'abandon, alors qu'en France, les bâtiments sont soit murés et aveuglés, soit utilisés pour le stockage» .
Plusieurs voyages dans le nord-est des Etats-Unis, en particulier à Detroit, dans le Michigan, ont mené Yves et Romain vers des théâtres à l'abandon, des centrales électriques dont on a l'impression que les employés viennent de les fuir en hâte, laissant derrière eux, ici une chaise tombée sur le sol, là quelques feuilles échappées d'un dossier, éparpillées sur le sol... Seuls la poussière et les murs effrités témoignent du nombre d'années écoulées depuis l'abandon.
«Nous avons aussi remarqué qu'en France, un bâtiment désert est systématiquement vandalisé, les meubles disparaissent vite pour être revendus sur des brocantes. Aux Etats-Unis, certains bâtiments à l'abandon sont grands ouverts et restent intouchés, on les retrouve tels qu'ils étaient lorsqu'ils étaient occupés.»
En Allemagne de l'Est, les deux photographes sont
«surpris par le côté fou des bâtiments. Il n'existe pas beaucoup de documentation sur l'architecture industrielle du XIXe siècle, et pourtant nous avons découvert des villes où l'usine est énorme, au milieu du village. Ces usines, souvent en briques et datant de la fin du XIXe siècle, sont les plus remarquables dans ce paysage où l'industrie prend une place énorme» , se souvient Romain Meffre. Contrairement à la Belgique et à la France, les villes de l'est de l'Allemagne telle que Leipzig ont conservé nombre de leurs anciens bâtiments industriels.
«Pendant l'ère soviétique, il n'y a pas eu dans cette région autant de démolitions et reconstructions que dans l'ouest de l'Europe» explique t-il.
«Notre but n'est pas de faire un archivage systématique mais de garder ce qui nous paraît intéressant» , explique Yves. L'exposition fait voyager à travers le monde, l'industrie et le temps, mais rappelle aussi un gout d'éphémère.
«On trouve souvent de vieilles photos de ces usines lorsqu'elles fonctionnaient, mais il existe peu de traces de la période d'abandon des sites, qui n'est pas bonne pour l'image des entreprises qui étaient dans ces lieux» , explique Yves Marchand.
«Lorsque nous trouvons un bâtiment intéressant, nous prenons immédiatement des photos, car nous ne retrouverons peut-être pas la même chose ailleurs, et surtout, certains sont voués à la démolition» .
Industria : Ruines industrielles
Du 5 septembre au 6 octobre
Galerie Kennory Kim, 22 rue des vertus, Paris 3e.
http://reliques.online.fr
Aciérie - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
industria acierie © Marchand - Meffre
"La révolution industrielle a engendré des monuments civils et usiniers souvent originaux et parfois grandiose" estiment Romain Meffre et Yves Marchand.
Aciérie - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
Bureau - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
industria bureau © Marchand - Meffre
"Nous mettons en valeur le côté historique de ces bâtiments".
Bureau - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
Usine - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
Usine de Muldenstein, dans l'est de l'Allemagne. © Marchand-Mestre
Usine de Muldenstein, dans l'est de l'Allemagne.
Usine - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
Des édifices abandonnés
Industria abandon © Marchand-Meffre
Pour Yves Marchand et Romain Meffre, "l'état de ruine représente le stade ultime de la vie d'un édifice".
Des édifices abandonnés
Les photographes - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes
Yves Marchand et Romain Meffre industria © Batiactu
Yves Marchand et Romain Meffre ont voyagé pendant plusieurs années en France, en Belgique, en Italie, en Allemagne, au Canada et aux Etats-Unis à la recherche de ruines industrielles.
Les photographes - Industria, quand les ruines industrielles racontent les villes