Tout le monde connaît la chaise n°14 de Thonet dite aussi "chaise bistrot", vendue à plus de 50 millions d'exemplaires dans le monde. Mais peu savent qu'elle a marqué l'histoire du meuble. Retour sur une entreprise pas comme les autres.
Il était une fois la chaise Thonet n°14, une chaise qui a marqué l'histoire. Plus que les illustres personnalités qui s'y sont assises - citons parmi d'autres, Johannes Brahms, Lénine, Charlie Chaplin, Picasso ou encore Marylin Monroe - sa fabrication en elle-même a révolutionné l'univers du mobilier.
Tout commence à la fin du XIXe siècle. Michael Thonet, maître-menuisier allemand, crée en 1819 son atelier à Boppard sur le Rhin où il expérimente de nouvelles techniques de fabrication. Sa renommée gagne vite la cour impériale qui le fait venir à Vienne en 1842. Il contribue notamment à l'ameublement des Palais Lichtenstein, Schwarzenberg et du célèbre café viennois Daum.
Procédant aux premiers essais de bois cintré, il réussit par la suite à mettre au point la technique de cintrage de bois massif (réussie après une longue exposition à l'eau et la vapeur à l'aide de bandes de tôle en fer dans des moules de fonte). Inventeur, son talent ne s'arrête pas là. Son idée est simple : créer une ligne de mobilier démontable, dont les pièces détachées seront produites en série. Grâce à lui, la révolution industrielle franchit les portes des ateliers.
En 1859, la chaise de café numéro 14, porteuse de la technique exclusive de bois massif courbé, symbolise cette entrée dans une nouvelle ère. En six parties, reliées par 8 vis, elle se monte, se démonte et se transporte facilement. Imaginez : les 216 parties de 36 chaises n°14 représentent seulement un mètre cube en volume ! Par son design parfait, sa fonctionnalité, sa maniabilité, son prix, elle connaît très vite le succès.
La maison Thonet continue sur sa lancée. Le bois courbé inspire les plus grands designers, comme Otto Wagner qui crée en 1904 le fauteuil "Art nouveau 247". En 1912, la production de l'entreprise familiale atteint son plus haut niveau : deux millions d'articles différents sont fabriqués et vendus dans le monde.
Dans les années 30, la maison Thonet, aux mains des descendants de Michael, innove encore en devenant le plus grand producteur mondial de meubles en acier tubulaire et s'illustre avec des modèles signés Marcel Breuer, Mart Stam ou encore Mies van der Rohe.
Un siècle et demi et cinq générations de Thonet plus tard, la chaise "bistrot", appelée n°214 aujourd'hui, est toujours au catalogue. Elle a été vendue depuis sa création à plus de 50 millions d'exemplaires ! Souvent copiée mais jamais égalée, elle continue d'inspirer les designers du monde entier. Alors, la prochaine fois que vous dégusterez votre petit noir sur une terrasse, dites-vous que la chaise sur laquelle vous êtes assis n'est peut être pas si banale que cela...
www.thonet.de
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La Thonet - Thonet, le pionnier
chaises thonet ensemble © Thonet
Le modèle 14, devenu 214, se décline aujourd'hui sous de multiples formes et couleurs. Sa version originale est recherchée des collectionneurs. Les modèles Thonet atteignent des records en salles des ventes. Et les musées en présentent dans leurs collections permanentes comme le Musée d'Orsay à Paris ou encore le Musée d'Art moderne de New York (MoMA).
La Thonet - Thonet, le pionnier
Marcel Breuer - Thonet, le pionnier
En 1929, l'entreprise Thonet rachète l'entreprise Standard Möbel de Marcel Breuer et Kálmán Lengyel et acquiert ainsi les droits sur les dessins de Marcel Breuer. Elève puis professeur au Bauhaus, littéralement « Maison du bâtiment » (une école d'arts et d'architecture qui a marqué en son temps l'Allemagne) Marcel Breuer y mit au point les techniques de mobilier en acier tubulaire. Thonet s'engage ainsi dans la production avec cette technique et en devient rapidement le premier producteur mondial.
Marcel Breuer - Thonet, le pionnier
La S43 de Mart Stam (1931)
la S43 de M. Stam thonet © Thonet
Cette chaise symbolise l'entrée dans l'ère du mobilier en acier tubulaire pour Thonet. Mart Stam fut un des pionniers du design de mobilier moderne. Ce fauteuil oscillant, sans pied arrière constitue une des plus grandes innovations du XXe siècle. Ce modèle se décline aujourd'hui dans de nombreuses versions.
La S43 de Mart Stam (1931)
La S35 (1929) - Thonet, le pionnier
Ce fauteuil d'intérieur, signé Marcel Breuer, demeure un des modèles précurseurs de la technique d'acier courbé. Existe avec une assise, un dossier et le tabouret en rotin ou revêtu de peau de vache avec des appuie-bras hêtre teinté bois.
La S35 (1929) - Thonet, le pionnier
Le S 285 (1935) - Thonet, le pionnier
Marcel Breuer crée également ce bureau. Datant de 1935, ses formes restent pourtant très contemporaines.
Le S 285 (1935) - Thonet, le pionnier
B9 (1925-26) - Thonet, le pionnier
Encore une création incontournable de Marcel Breuer : ces tables basses gigognes en acier tubulaire chromé, pièces en bois de hêtre teinté bois ou peint.
B9 (1925-26) - Thonet, le pionnier
La S 36 de Hans Luckhardt (1931)
La S 36 de Hans Luckhardt (1931) © Thonet
L'objectif de Hans Luckhardt, architecte allemand de renom féru de technique autant que concepteur engagé, était "un confort d'assise de forme esthétique". Il signe pour Thonet cette chaise oscillante en acier et bois en 1931.
La S 36 de Hans Luckhardt (1931)
LS 22 d'Anton Lorenz (1931)
Anton Lorenz reconnut dès l'origine le potentiel des fauteuils oscillants de Mart Stam et, s'arrangeant avec ce dernier, lança une série de procès contre d'autres fabricants et plagiaires qui marquèrent l'histoire du mobilier en acier tubulaire. Il exerça chez Thonet à la direction du service de la protection de la propriété industrielle. Mais il en profita également pour créer quelques meubles. Ce "relax" a une structure en acier inoxydable avec sangles en filet textile (convenant à l'extérieur), coussin rembourré avec housse textile ou cuir.
LS 22 d'Anton Lorenz (1931)
Le S 826 d'Ulrich Böhme (1971)
Le S826 d'Ulrich Böhme (1971) © Thonet
Ce fauteuil est signé Ulrich Böhme. En acier tubulaire chromé, coque d'assise rembourrée avec housse textile ou cuir.
Le S 826 d'Ulrich Böhme (1971)
La 214 revisitée (1985) - Thonet, le pionnier
La 214 revisitée (1985) © Thonet
L'ancienne chaise numéro 14 inspire toujours les designers. La K.214, dite "Knot Chair", vient comme un clin d'œil saluer son illustre aïeule !
La 214 revisitée (1985) - Thonet, le pionnier
Une histoire de famille
Une histoire de famille Thonet © Thonet
Alors qu'un troisième siècle de production s'ouvre pour l'entreprise, Thonet reste familiale. Michael Thonet n'avait que des fils, et aujourd'hui encore, ce sont trois frères qui sont aux commandes. Du haut jusqu'en bas, Claus, Philipp et Peter ont repris le flambeau, dans l'esprit de leur arrière arrière grand-père, en fabriquant de nouveaux modèles conçus par des architectes et designers renommés, comme Sir Norman Foster ou encore James Irvine.
Une histoire de famille