Des créations pour de grands éditeurs italiens tels que Cappellini ou encore Magis, des projets d'architecture pour des marques comme Lancel et Van Cleef&Arpels, des scénographies pour Louis Vuitton, Christian Dior... La biographie du designer Patrick Norguet est impressionnante. Pourtant, l'homme n'a pas pris la grosse tête. Il reste simple et accessible, comme le prouvent ses réponses aux questions posées par Maison à part.
Maison à part : Qu'est-ce qui a fait que vous êtes devenu designer ?
Patrick Norguet : Tout est parti de ma passion pour le dessin. Lorsque j'étais jeune, je passais tous les mercredis après-midi à dessiner à l'école des Beaux Arts. J'ai passé un CAP de dessinateur industriel puis intégré une école d'ingénieurs en productique mais, les mathématiques appliquées ne m'ont jamais autant intéressé que les arts plastiques. Du coup, j'ai tout abandonné pour suivre une formation à L'Ecole Supérieure du Design Industriel. J'y ai trouvé mon compte puisque le dessin était indispensable pour coucher mes idées. Aujourd'hui encore d'ailleurs, tout commence toujours par le papier.
MAP : Vous souvenez-vous de votre toute première création ?
P. N : Oui, très bien. Je me souviens avoir trouvé sur une plage un galet portant la trace d'empreintes de coquillages. Je l'avais trouvé très beau et j'ai voulu le retranscrire sous la forme d'un objet à la fois poétique et fonctionnel. Cela a donné lieu à la création d'un petit vase en céramique en forme de galet :
"Ancolie". J'ai ensuite décliné le modèle en plusieurs versions et il en a résulté une famille de soliflores.
MAP : Y a-t-il eu une rencontre déterminante au début de votre carrière ?
P. N : Si je ne devais retenir qu'une seule rencontre, ce serait celle avec Julio Capellini. Elle s'est faite sur le salon du Meuble de Paris en 1999. J'y exposais l'une de mes créations, la « Rainbow », une chaise multicolore en plexiglas, que j'avais réussi, tant bien que mal, à éditer à deux exemplaires par mes propres moyens. Giulio Cappellini est passé sur mon stand et il a été séduit par mon travail de recherche. Quelques jours après l'événement, il m'a téléphoné en personne sur mon portable pour me proposer de collaborer avec lui. C'était tellement irréel qu'au départ, j'ai cru à une blague ! La pièce a finalement été présentée en 2000 sur le salon de Milan et tout s'est ensuite enchaîné pour moi. C'est d'ailleurs ce qui me fait dire que
"Rainbow chair" a été un véritable passeport d'entrée dans le milieu du design.
P. N : C'est avant tout, et surtout, un travail d'écoute et d'échange, car le designer ne travaille pas tout seul dans son coin. Pour réaliser ses créations, il s'appuie sur le savoir-faire d'une entreprise, aussi doit-il être en parfaite osmose avec elle. Il doit la comprendre, comprendre son contexte industriel et prendre le temps d'expérimenter des choses avec elle. Personnellement, ce que j'aime faire, c'est décortiquer complètement les choses : partir de zéro pour reconstruire tout en exprimant un ressenti à un moment donné.
MAP : Quel métier auriez-vous voulu faire si cela n'avait pas été celui-là ?
P. N : Cela va être dur de répondre car tous les matins j'ai envie de faire quelque chose de nouveau ! De fait, il y a beaucoup de métiers qui m'attirent. Un jour, c'est géologue ou cuisinier, un autre c'est musicien. En y réfléchissant, je crois que je suis attiré par tous les métiers qui sont basés sur un travail de la matière et offrent des possibilités d'expression.
MAP : Quelle est votre devise dans la vie ?
P. N : Je n'ai pas vraiment de devise mais par contre, j'ai une philosophie de vie. Je fais partie de ceux qui pensent que le temps passe trop vite pour que l'on s'embête avec des broutilles. Il faut se concentrer sur ses priorités.
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En aparté avec Patrick Norguet, designer
En aparté avec Patrick Norguet, designer - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
MAP : De quel projet êtes-vous le plus fier ?
P. N : J'aurais du mal à en citer un plus qu'un autre car il y a de la fierté dans tous les projets que j'ai réalisés jusqu'ici. Chaque projet a sa propre histoire et toutes ces histoires m'évoquent de bons moments. Réaliser un meuble ou un objet, ça ne se fait pas en un jour. C'est un travail sur du long terme. Dans les films, on change le scripte au denier moment, on coupe certains extraits au montage, on modifie l'ordre des scènes, etc. Et bien dans le design, c'est pareil ! Il faut sans cesse retravailler pour parvenir à ce que l'on veut. D'ailleurs, on en revient encore à l'idée de déconstruire pour reconstruire.
MAP : Y a-t-il un projet un peu fou que vous rêvez de réaliser ?
P. N : Aucun ne me vient en tête mais, c'est peut-être parce que je m'autorise déjà tout. Travailler avec Mc Donald's, cela peut paraître fou mais j'ai accepté de le faire ! Pourquoi ? Tout simplement parce j'aime les challenges et que celui qu'on me proposait de relever était de taille. Ma mission était délicate puisqu'il s'agissait d'inventer un nouveau concept de restaurant qui, en plus d'apporter un nouveau souffle à la marque, soit suffisamment universel à la fois pour s'adapter à ses 500.000 millions de clients quotidiens, et pour devenir un modèle duplicable.
MAP : Quel est l'objet dont vous auriez aimé être le créateur ?
P. N : Il n'y en a pas vraiment mais après, il y a forcément des pièces qui me touchent plus que d'autres : la chaise
"Pipe Green" de Jasper Morrison, par exemple, ou encore la chaise
"One" de Constantin Grcic. Ces objets me plaisent parce qu'ils sont à la fois intelligents, innovants et surtout intemporels. L'intemporalité est une notion très importante à mes yeux. Les objets doivent être faits pour être des passeurs du temps.
P. N : C'est un juste équilibre entre une forme et un matériau. L'indice qui ne trompe pas, c'est lorsque l'objet parle tout seul, lorsqu'il arrive à susciter de l'attraction de personnes de différents âges, pays et cultures.
MAP : Justement, si une de vos créations pouvait parler, qu'aimeriez-vous qu'elle vous dise ?
P. N : Je crois qu'elle dirait : « Laissez moi de l'air ou laissez moi respirer ». Je m'explique : Il faut laisser le temps aux produits de s'installer chez les gens. Prenons l'exemple de ma lampe. Pendant dix ans, elle n'a pas suscité le moindre intérêt et puis, un jour, elle a été remarquée et depuis, elle est devenue la lampe de référence des architectes. Si je ne m'étais pas battu pour elle, elle serait probablement tombée aux oubliettes et c'est vraiment dommage. Chaque produit mérite sa chance.
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En aparté avec Patrick Norguet, designer
En aparté avec Patrick Norguet, designer
En aparté avec Patrick Norguet, designer - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
MAP : Considérez-vous votre art comme de l'art ?
P. N : En tant que designer, nous naviguons entre plusieurs disciplines. Au début, nous sommes forcément tous un peu artiste puisque tout projet commence par un dessin. D'ailleurs, beaucoup de designers sont inscrits à la maison des artistes. Ce qui nous différencie des artistes, c'est que notre projet ne reste pas figé, nous l'emmenons plus loin, sur une voie industrielle.
MAP : Votre métier, un vecteur d'engagement, un outil pour faire passer un message ?
P. N : On ne va pas fausser la donne : bien sûr que le design n'est pas un moyen de changer le monde ! J'estime cependant que nous avons quand même une responsabilité à jouer en termes de consommation. A travers nos créations, notamment le choix des matériaux, nous pouvons implicitement inciter les gens à mieux consommer. Ne perdons pas de vue que nous avons un pied chez les industriels et que cette position nous confère de fait, un certain pouvoir, très limité, certes, mais un pouvoir quand même.
P. N : Je vais présenter un certain nombre de nouveautés sur le prochain salon de Milan : des meubles style années 60 pour Techno, du mobilier de bureau pour Tacchnini, une famille d'assises pour Alias design, une chaise de Kristalia, une nouvelle collection de miroirs pour Pleyel ... Parallèlement, je poursuis mon travail avec Mc Donald's. Cette fois, il m'a été demandé de réécrire tout le mobilier extérieur. Je suis également en train de travailler sur un nouveau concept d'hôtel qui devrait ouvrir ses portes en 2013 à Nantes.
P. N : Consommez utile !
Découvrez quelques-unes des créations et réalisations de Patrick Norguet en pages suivantes.
En aparté avec Patrick Norguet, designer
"Rainbow" chair - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Patrick Norguet Studio Design © Studio Patrick Norguet Design
Chaise en plexiglas multicolore. C'est grâce à elle que Patrick Norguet a été repéré par Giulio Cappellini en 1999 lors du salon du Meuble de Paris.
Editeur : Cappellini
Année : 1999/2000
Collection: Scratch
Dimensions : 69 x 55 x 39/67 cm
"Rainbow" chair - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Tabourets "Nao" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Tabourets "Nao" - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Tabouret à trois pieds réalisé en bois laqué, disponible en plusieurs hauteurs et plusieurs coloris
Pour en savoir plus : Tabouret Nao - Silvera - Marie Claire Maison
Editeur : Silvera
Dimensions : H. 84, 4 (H. assise 75) x P. 40, 7 x l. 36 cm
Année : 2005
Tabourets "Nao" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Fauteui "Rhea" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Fauteui "Rhea" - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Fauteuil avec une structure en profilé d'acier façonné, recouverte de mousse polyutréthane moulée.
Editeur : Frighetto
Année : 2007
Fauteui "Rhea" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Guéridon "Fold" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Guéridon "Fold" - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Table d'appoint réalisée grâce à une technique de découpe au laser
Editeur : Modus
Année : 2008
Guéridon "Fold" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
"Stem" chair - En aparté avec Patrick Norguet, designer
"Stem" chair - Patrick Norguet Studio Design © Studio Patrick Norguet Design
Assise constituée de tubes métalliques cintrés. Modèle disponible en version sur pieds ou sur roulettes et en finition laquée noire, blanche ou rouge.
Editeur : Crassevig
Année : 2009
"Stem" chair - En aparté avec Patrick Norguet, designer
"Makil" chair - En aparté avec Patrick Norguet, designer
"Makil" chair - Patrick Norguet Studio Design © Studio Patrick Norguet Design
Chaise empilable en chêne cintré
Editeur : Alki
Année : 2011
Dimensions : H. 77 x L. 59 x P.48 cm
"Makil" chair - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Canapé "Boarding" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Canapé "Boarding" - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Assise aux lignes sobres reposant sur un piétement tubulaire
Editeur : Lapalma
Produit destiné aussi bien aux collectivités qu'aux particuliers
Canapé "Boarding" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Lampes "Tools" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Patrick Norguet © Morgane Legal
Collection de lampes à poser ou à fixer, facilement adaptables à tous les besoins.
Editeur : Artuce
Année : 2011
Lampes "Tools" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Tables "Degree" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Tables "Degree" - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Table d'appoint
Editeur : Kristalia
Année : 2011
Tables "Degree" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Restaurant Mac Donald
Restaurant Mac Donald - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Patrick Norguet signe la nouvelle architecture intérieure des restaurants Mac Donald.
Année : 2011
Restaurant Mac Donald
Chaise "Compas" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Chaise "Compas" - Studio Patrick Norguet Design © Studio Patrick Norguet Design
Chaise empilable pouvant être utilisée aussi bien à
l'intérieur qu'à l'extérieur.
Assise et dossier en polypropylène - Pieds en aluminium moulé sous pression, laqué époxy
Editeur : Kristalia
Année : 2012
Chaise "Compas" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Miroirs "Triptyque" - En aparté avec Patrick Norguet, designer
Studio Patrcik Norguet Design © Studio Patrcik Norguet Design
Editeur : Pleyel
"J'ai voulu pour cette première collaboration avec Pleyel dessiner une famille de miroirs ou plus exactement trois triptyques.
Composés chacun de trois surfaces en miroir noir orientable, donnant ainsi une imagefractale de l'environnement dans lequel ils se situent. Une fixation invisible renforce l'idée d'un objet mystérieux accroché au mur. Une finition en laque noir mat vient en opposition à une surface", explique Patrick Norguet.
Année : 2012
Miroirs "Triptyque" - En aparté avec Patrick Norguet, designer