Louis Majorelle, l'un des fondateurs de l'école de Nancy, s'illustra dans les arts décoratifs, dans la première moitié du XXe siècle, depuis les prémices de l'Art nouveau jusqu'à celles de la modernité des années 30. A l'occasion des 150 ans de sa naissance, une rétrospective dans sa ville, Nancy, permet de découvrir 170 œuvres rendant compte de la formidable créativité de la Maison Majorelle. Portrait.
La Maison Majorelle : une histoire artistique, familiale, une plongée dans l'univers des arts décoratifs de la première moitié du XXe siècle, à l'aube de l'Art nouveau jusqu'au modernisme des années 30 et 40. A l'occasion des 150 ans de la naissance de celui qui l'accompagna durant toutes ces années, une rétrospective organisée par les Galeries Poirel permet de (re)découvrir le grand Louis Majorelle, à travers 170 œuvres rassemblées pour la première fois dans la ville qui l'a vu s'épanouir, Nancy, berceau de l'entreprise.
Tout commence en effet en 1860. Rue des Dominicains, Auguste Majorelle (1825-1879), ouvre un commerce de meubles et d'objets d'art, spécialisé dans la faïence puis la décoration de mobilier dans le style japonais et la copie de style. Il connaît le succès, obtenant notamment la médaille d'argent à l'Exposition universelle de Paris en 1878. Son fils Louis, l'aîné de ses huit enfants, est né en 1859. Voulant embrasser une carrière artistique, il part pour les Beaux-arts à Paris en 1877. Mais la mort d'Auguste deux ans plus tard, l'oblige à reprendre l'activité familiale, qui compte une
portrait Louis Majorelle © Louis Majorelle par J. Majorelle - ph.C. Philippot
vingtaine d'ouvriers, avec sa mère et son frère. Louis se plonge alors dans l'
industrie d'art, donnant à la manufacture un essor sans pareille, grâce notamment à son sens artistique unique, duquel il forgera un "
style Majorelle".
"Homme de son temps, Louis Majorelle était à l'écoute de la modernité, explique la commissaire de l'exposition Majorelle, un art de vivre moderne, Roselyne Bouvier, dans une présentation.
Son style a su s'adapter tant aux évolutions formelles et décoratives qu'aux pratiques et modes de vie d'une société nouvelle." Premier succès : la production de mobilier moderne, influencé par la nature et les recherches d'Emile Gallé, avec qui il fondera également en 1901, la fameuse Ecole de Nancy. En même temps, il poursuit la production industrielle de copies de style. Et c'est avec son frère Jules, responsable commercial, qu'il développe l'entreprise notamment à Paris et à l'international, de Londres et Berlin, à Oran. En 1905, l'entreprise compte ainsi près de 250 employés. Pour les Majorelle, la production de meuble s'entend pour tous : mobilier de luxe mais aussi mobilier bon marché fabriqué en série. La manufacture s'est installée en 1897 dans de nouveaux bâtiments, rue du Vieil Aître, toujours à Nancy, à deux pas de la demeure de Louis, la fameuse Villa
Jika (dite
villa Majorelle), dessinée par Henri Sauvage (voir diaporama).
Même si l'ébénisterie occupe une place importante dans l'activité de l'entreprise - Louis étant avant tout un artiste du bois - le travail du métal est également développé par la Maison Majorelle, à travers la réalisation de
serrures et ferronneries architecturales, comme la rampe de l'escalier central des Galeries Lafayette, boulevard Hausmann à Paris, mais également par l'application de bronze sur les meubles. Avec le cristallier Daum, Louis Majorelle élabore aussi des luminaires, puis, après la première guerre, des vases soufflés de style Art déco. La technique des verreries cloisonnées, développée par leur soin, leur permet toutes les audaces.
"Ici, comme dans le mobilier, expliquent les organisateurs de l'exposition,
les formes géométriques et les motifs stylisés suivent les tendances les plus modernes, tout en conservant un style élégant et d'une qualité irréprochable, marque de l'expérience de Majorelle." Créateur et directeur artistique à la Manufacture, Louis Majorelle se fait aussi ensemblier, décorateur, signant les aménagements de nombreux endroits prestigieux, comme des ambassades, des hôtels ou des villas...
A la mort de Louis en 1926, la maison Majorelle s'est ainsi imposée comme une figure incontournable dans l'univers des arts décoratifs, emportant de nombreux prix lors des expositions universelles. Alfred Lévy, son collaborateur, prend la suite, toujours aidé par Jules Majorelle, puis par le fils de ce dernier. Les collaborations prestigieuses se poursuivent comme avec Paul Beucher ou encore Jean Prouvé... Faire appel à la Maison Majorelle est toujours gage de qualité. L'aménagement des appartements et cabines du Paquebot Normandie leur sera ainsi confié en 1935. Mais la deuxième guerre passe par là, le déclin s'annonce, face
"aux difficiles années de la reconstruction". Et les ateliers finissent par fermer définitivement en 1956.
Figure incontournable, Louis Majorelle a contribué à ce que les arts décoratifs soient ce qu'ils sont encore aujourd'hui : des arts à part entière et au service de la vie. C'est dire si la rétrospective des Galeries Poirel vaut le détour ! L'occasion en plus de visiter la ville de Nancy, sous l'oeil "neuf" de l'art...
Pour découvrir certaines des œuvres exposées et la villa Majorelle, cliquez sur suivant.
Majorelle, un art de vivre moderne - Galeries Poirel, Nancy
Du 2 mai au 30 août 2009
Commissariat de l'exposition : Roselyne Bouvier
3, rue Victor Poirel
54000 Nancy
Ouvert du mercredi au dimanche de 10h à 18h
Catalogue de l'exposition disponible, éditions N. Chaudun - Ville de Nancy, 35€.
Fauteuil Fougères - Arts décoratifs : Majorelle, art nouveau et modernité
Fauteuil Fougères - Majorelle © ph. D. Boyer
Epernay, Maison
Perrier-Jouët
La rétrospective organisée par les Galeries Poirel est l'occasion de (re)découvrir l'oeuvre de la Maison Majorelle et l'histoire de sa figure emblématique, Louis Majorelle.
Fauteuil Fougères - Arts décoratifs : Majorelle, art nouveau et modernité
Table de chevet
Table de chevet © ph. C. Philippot
1902
Musée de l'Ecole de Nancy
Achat, 1983-1984
Cette table provient de la chambre à coucher de Louis Majorelle, réalisée pour la Villa Jika de Nancy.
Table de chevet
Lampe au magnolia
Lampe au magnolia © ph. D. Boyer
Modèle créé vers 1900
En collaboration avec la manufacture Daum
Collection particulière
Lampe au magnolia
Devant de foyer
Devant de foyer © ph. C. Philippot
Musée de l'Ecole de Nancy
achat en vente publique en 2006
Là encore, une belle pièce provenant de la Villa Jika de Nancy.
Devant de foyer
Meuble aux pélicans
Meuble pelican Majorelle © Meuble aux pélicans, 1925 - ph. C. Duranti
Modèle créé vers 1925
En collaboration avec Louis Janin
Collection Rémi et Maxime Sorriano.
Meuble aux pélicans
Maison Majorelle - Arts décoratifs : Majorelle, art nouveau et modernité
villa juka © Musée de l'Ecole de Nancy - ph. P. Mignot
Pour les plans de sa maison personnelle, Louis Majorelle fait appel à l'architecte Henri Sauvage, en 1898. Dite Ville Jika, pour les initiales de son épouse, Jeanne Kretz, la maison, première maison entièrement Art Nouveau de Nancy, est construite en 1901 et 1902. Selon l'école de Nancy,
"la villa Majorelle témoigne encore tant dans son architecture extérieure que dans sa décoration intérieure de la notion d'unité de l'art prônée par de nombreux artistes de l'époque." Frantz Jourdain, dans l'ouvrage
L'Art décoratif, cité toujours par l'Ecole de Nancy dans
sa présentation de la maison, a dit ainsi de'elle :
"Se préoccupant avant tout du sujet à traiter, M. Henri Sauvage a doté la villa nancéienne d'un caractère spécial , celui d'une habitation ni somptueuse, ni vaniteuse, d'une habitation qui ne doit être la demeure ni d'un parvenu, ni d'un prince, d'une habitation qui ne cherche nullement à exciter l'envie des passants par l'exhibition d'un faste menteur. Nous devinons la maison d'un artiste sensitif et affairé, au cerveau cultivé, à l'oeil délicat, que le jugement d'autrui préoccupe peu et qui désire seulement vivre d'une vie propre dans une atmosphère élevée, intelligente et pure."
Maison Majorelle - Arts décoratifs : Majorelle, art nouveau et modernité
Intérieur Villa Majorelle
Intérieur Villa Majorelle © Musée de l'école de Nancy - ph. P. Mignot
Salle à manger, "Les blés, modèle riche"
Mobilier et boiseries de Majorelle
Cheminée en grès flammé de Bigot
Vitraux de Gruber
Peintures de Jourdain
Classée Monument historique en 1996, la villa est ouverte au public depuis 1997. La salle à manger est une des pièces fortes de la visite par sa richesse. Louis Majorelle a en effet fait appel à de nombreux artistes, tant parisiens que nancéiens, ce qui fait de sa maison un véritable manifeste de l'Art Nouveau de l'époque. Outre l'architecte et décorateur parisien Henri Sauvage, à qui l'on doit la conception du bâtiment et, aux côtés des créations propres de Louis Majorelle, en mobilier, boiseries et ferronneries, on peut reconnaître notamment des oeuvres du céramiste Alexandre Bigot (1862-1927), du peintre-verrier Jacques Gruber et des peintres Francis Jourdain (1876-1958) et, plus tardivement, Henri Royer (1869-1938).
Intérieur Villa Majorelle
Le "style Majorelle"