Avec pas moins de mille œuvres de Ben Vautier, le Musée d'art contemporain (MAC) de Lyon organise la plus importante rétrospective jamais réalisée sur cet artiste atypique qui donne accès à son "art" de la petite phrase à tout un chacun, au travers de nos objets dérivés. L'occasion de revenir sur cinquante ans de mots souvent justes et cinglants, caractérisés par une écriture à la main faussement enfantine, devenue familière, et sur leur auteur : un artiste qui, du haut de ses 74 ans, reste provocateur - comme l'illustre l'intitulé de l'exposition - et précurseur.

Les mots au créneau

L'aventure commence à la fin des années 50. Déjà convaincu que "l'art doit être nouveau et apporter un choc", Ben Vautier part à la recherche d'une forme qui n'a jamais été explorée par aucun artiste et s'arrête sur un objet pour le moins trivial : la banane. Alors qu'il présente ses dessins au peintre Yves Klein, celui-ci lui conseille de s'orienter vers les mots. "Chez toi, ce qui compte, c'est l'écriture", lui explique-t-il. C'est le déclic. Dès le début des années 60, Ben, alors propriétaire d'une boutique à Nice, recouvre progressivement ses murs de phrases, de slogans et d'aphorismes avant de les inscrire sur des panneaux et des toiles. "J'ai voulu abandonner l'art mais j'en ai fait de l'art", "On est tous ego", "Achetez n'importe quoi" sont quelques unes de ses expressions les plus connues. Véritable chroniqueur de notre temps, Ben sait se faire tour à tour caustique, drôle, dramatique, érudit ou populaire. Sa marque de fabrique ? Son style d'écriture simple, rond et singulier, qui rend ses messages reconnaissables entre tous.

Des murs aux objets

Ben recherche intrinsèquement la plus large diffusion de son œuvre. Pour lui, il n'y pas de coupure ni de hiérarchie entre l'art et la vie. Dès 1958, il décide donc d'apporter une signature à tout ce qui n'a jamais été souligné. En 1961, il présente notamment à Yves Klein une balle de ping-pong censée contenir Dieu et la dépose dans une boite avant d'écrire sur le couvercle "moi Ben j'expose je signe et je vends Dieu". Outre de traditionnels tableaux, il n'hésite pas, depuis, à répondre favorablement aux sollicitations des entreprises pour apposer ses textes sur des miroirs, des boites, des corbeilles à papier ou, plus récemment, des canifs. Avec cette prise de position, Ben tend à transformer l'art en un véritable objet de marketing. Cependant l'artiste tient à rassurer ses admirateurs et affirme à qui veut l'entendre que sa première volonté est de rester "populaire et à bonne distance du libéralisme économique". Pour avoir un aperçu de l'oeuvre de Ben, cliquez sur suivant.