Le vintage : une sélection "grands crus"

    Publié le 12 novembre 2008 par Propos recueillis par Céline Chahi
    La folie du vintage
    La folie du vintage © MAP
    Le mot "vintage" a récemment fait son apparition dans le vocabulaire de la décoration. Mais, que veut-il vraiment dire ? A quelle époque, à quel type d'objets et à quels designers renvoie-t-il ? Daniel Romani, antiquaire spécialisé dans le mobilier du XXe siècle, a accepté d'éclaircir cette notion pour Maison à part...
    Maison à part : Que désigne exactement le terme "vintage" ?
    Daniel Romani : Le terme "vintage" est emprunté au vocabulaire œnologique. Il fait référence à un grand cru, un vin millésimé, qui a vieilli d'au moins dix ans. Par extension, on l'a employé dans le domaine de la mode puis, dans celui de la décoration, pour designer un meuble remarquable de part son originalité. Aujourd'hui, le mot s'applique à tout le mobilier dit "emblématique" d'une période qui va de l'après-guerre jusqu'aux années 80.
    MAP : Faut-il en déduire qu'il n'y a pas un style mais plusieurs dans le "vintage" ?
    D.R : Oui absolument. La tendance "vintage" couvre tous les grands courants créatifs du XXe siècle, aussi bien le minimalisme avec les meubles d'Alain Richard, de Pierre Guariche, ou de Joseph-André Motte que le futurisme avec les créations de Joe Colombo, de Verner Panton ou de Pierre Paulin. Elle englobe également le design des années 80, d'Ettore Sottsass à Starck en passant par Andrea Branzi. Au final, de nombreux objets très divers appartiennent à la catégorie "vintage" : divans, fauteuils, chaises, luminaires...
    MAP : Comment expliquer l'engouement que suscite aujourd'hui ces objets ?
    D.R : Ce regain d'intérêt pour les meubles du XXe siècle est lié aux profonds bouleversements qui s'opèrent dans notre société. Les gens ont perdu leurs repères et sont soumis à toutes sortes de restrictions. Pour se rassurer, ils sont obligés de se tourner vers le passé. Posséder des meubles "vintage", c'est s'offrir une bouffée d'oxygène. Cette respiration, ils la doivent aux designers de l'époque qui mettaient l'homme au cœur de leurs préoccupations, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui.
    MAP : Pourquoi la couleur orange est-elle toujours associée au "vintage" ?
    Daniel Romani - Design XXe
    Daniel Romani - antiquaire - Vintage © DR
    Daniel Romani - Design XXe
     
    D.R : Il y a eu dans les années 60 une importante production orange qui, étant donnée son succès, est devenue l'emblème du "vintage". A l'époque, tout le monde était convaincu que cette couleur donnait de l'appétit et, en poussant le raisonnement plus loin, favorisait l'acte d'achat. L'exemple le plus révélateur est celui des fast-foods. Le orange y était partout : depuis les plateaux jusqu'au comptoir en passant par les serviettes en papier. Dans le design, Raymond Loewy n'a pas eu peur de l'utiliser au niveau des façades de ses célèbres commodes et Anna Castelli pour habiller ses meubles de rangement cylindriques.
    MAP : Selon vous, quel objet incarne le mieux le "vintage" ?
    D.R : Si je ne devais en retenir qu'un, ce serait la cocotte minute "Coquelle" en fonte émaillée dessinée en 1958 par Raymond Loewy, l'inventeur du design industriel. Ce dernier a été le premier à mettre véritablement le design au service de l'homme. L'objet est tellement bien pensé qu'il a su traverser les époques sans prendre une ride. Une popularité telle que ses rééditions remportent à chaque fois un vif succès.

    MAP : Pourquoi affectionnez-vous particulièrement ce designer ?

    D.R : Je trouve qu'il a su trouver un équilibre parfait entre des lignes sobres et un design futuriste. Il se dégage des façades de ses meubles une véritable présence. J'y perçois une certaine tension, comme si quelqu'un était caché à l'arrière du meuble et poussait pour faire apparaître les poignées. Au bout de quinze ans, j'éprouve toujours la même fascination à les regarder.
    Le vintage : une sélection "grands crus"
    Articles qui devraient vous intéresser
     
    Recevez gratuitement
    La newsletter Maison à Part
    L'e-magazine de l'habitat sous tous les angles
    Vous pouvez vous désabonner en un clic