Joe Colombo, l'invention du futur

    Publié le 3 avril 2007 par Pauline Polgar
    Le designer visionnaire Joe Colombo fait l'objet d'une rétrospective aux Musées des Arts Décoratifs de Paris jusqu'au 19 août 2007. L'occasion de se pencher sur la vie de cet artiste inclassable, mort prématurément, qui a marqué sa génération et continue d'inspirer les designers d'aujourd'hui.
    Colombo est mort le jour de son anniversaire, le 31 juillet 1971, à l'âge de 41 ans. Ce designer atypique et visionnaire, né à Milan en 1930, a séduit toute une génération d'artistes et continue d'inspirer les nouveaux venus dans l'univers du design. Tour à tour peintre, sculpteur puis architecte, sa carrière de concepteur de mobilier débute seulement dans les années 60. Cette première période de sa vie est marquée par son adhésion au « Movimento nucleare » - le mouvement de peinture nucléaire - qui souligne déjà son imagination débordante de visions futuristes et fantastiques.
    Jusqu'en 1965, il s'oriente vers la création d'objets individuels, comme le fauteuil Elda (1963) à la structure autoportante en fibre de verre garnie de coussins de cuir, ou les lampes Acrilica (1962). En 1965-67, il développe le premier plastique moulé en un seul bloc pour le mobilier avec la chaise Universale.

    Modularité et flexibilité

    Une nouvelle période de sa vie s'ouvre à l'occasion de ses recherches sur la modularité et la flexibilité de la forme. Car pour Joe Colombo, le design est avant tout fonctionnel : « Donner forme à des produits fabriqués industriellement par le moyen du design signifie par-dessus tout dessiner un objet d'une manière objective pour l'usage ou pour sa destination finale. » (Extrait de l'essai de Ignazia Favata, son assistante, in Joe Colombo, l'invention du futur, éd. Vitra Design Museum / Les Arts décoratifs). Le Tube-chair (1969) par exemple, se compose de quatre cylindres qui peuvent s'emboîter les uns dans les autres pour un gain de place et leur transport. Par un jeu de combinaisons multiples, les cylindres se modulent du fauteuil haut ou court, jusqu'au transat.
    Juste avant sa disparition, le designer travaillait sur un concept de « cellule d'habitation » autonome répondant à chaque besoin de l'individu. Par exemple, la « cellule de jour », le Rotoliving créé en 1969 comprend d'un côté une horloge, une télévision, une stéréo et l'éclairage, et de l'autre des espaces de rangements. Une table pour le repas ou une table pour un bar peuvent être tirées.
    Le designer a acquis très vite une renommée internationale : il collabore avec de grandes maisons du design, comme Kartell, Zanotta ou O-Luce et participe à la réflexion sur son métier en donnant des conférences à travers le monde.

    Technologie, vision et utopie

    Toujours à mi-chemin entre l'œuvre d'art et le design, Joe Colombo n'a eu de cesse de créer de nouveaux concepts de vie, pendants de sa recherche sur le futur. C'est notamment cet artiste visionnaire qui fera date. Fasciné par la télévision, il fut par exemple le premier à l'intégrer directement dans plusieurs objets. Les nouvelles technologies l'inspiraient et il louait leur dynamisme. Selon Mateo Kries, qui a réalisé Joe Colombo, l'invention du futur, on retrouve dans l'œuvre du designer « technologie, vision et utopie » : « Il la [la technologie] voyait d'une part comme un moyen d'atteindre ses propres buts, et d'autre part, elle représentait une source d'inspiration formelle et avait pour lui un contenu existentiel. »
    Mateo Kries décrit la manière de travailler du designer comme « méthodique ». Sa base de travail ? « L'écologie, la psychologie, l'ergonomie et autres approches considérant l'homme d'aujourd'hui en relation avec son environnement, c'est-à-dire l'espace qui l'entoure directement et la décoration qui lui sert à vivre en cohérence avec la réalité qui l'entoure. »
    Personnage haut en couleurs, fantasque et « dandy », Joe Colombo fascinait son époque et fascine encore aujourd'hui. Sa mort prématurée n'entama pas sa notoriété, au contraire, et ses concepts trouvent toujours écho auprès des nouvelles générations.

    Publication :

    Joe Colombo, l'invention du futur, réalisé sous la direction d'Alexander Von Vegesack et Mateo Kries. Ouvrage rassemblant huit essais sur le designer, un catalogue de l'ensemble de son œuvre et des entretiens avec des personnages qui l'ont côtoyé.
    Ed. Vitra Design Museum / Les Arts Décoratifs, 59,90 €.

    Exposition :

    Joe Colombo, l'invention du futur

    Musée des Arts décoratifs, du 29 mars au 19 août 2007
    Ouverts du mardi au vendredi de 11h à 18h
    Samedi et dimanche de 10 h à 18h
    Nocturne le jeudi jusqu'à 21h
    Entrée : 8 € (tarif réduit 6,50 €)
    Visites guidées, ateliers découvertes pour les enfants autour de l'exposition.
    107 rue de Rivoli
    75001 Paris
    T. 01 44 55 57 50
    www.lesartsdecoratifs.fr
    Pour découvrir quelques œuvres Joe Colombo, cliquez sur suivant
    Joe Colombo, l'invention du futur

    La Chaise Universale

    chaise universale
    chaise universale © Joe Colombo assis sur une chaise Universale-DR
    Joe Colombo a commencé par dessiner des objets individuels. Il est ici assis sur une chaise Universale, Kartell, vers 1967.
    La Chaise Universale

    Il kilometro - Joe Colombo, l'invention du futur

    Il kilometro joe colombo
    Il kilometro joe colombo © Joe colombo dans son living-room-DR
    Personnage fantasque, Joe Colombo se mettait souvent en scène chez lui pour les journalistes. Ici dans son living-room avec, en arrière-plan, sa collection de pipes sur le système de rayonnage Il kilometro.
    Il kilometro - Joe Colombo, l'invention du futur

    L'homme privé

    Joe colombo Via Argelati, 1967
    Joe colombo Via Argelati, 1967 © Via Argelati, 1967 - DR
    Chacun de ses appartements reflétait l'univers de Joe Colombo à une période donnée. Ignazia Favata raconte : « En 10 ans, il avait totalement changé son style de vie à quatre reprises, à chaque fois d'une façon très originale (...) Dans le quatrième, l'ameublement était mobile et si futuriste que les gens essayaient - sans succès- de trouver une chaise paraissant assez sûre pour que l'on puisse s'asseoir. » Ici, Via Argelati 30. Milan 1967.
    L'homme privé

    Les "cellules d'habitation"

    Visiona 1, 1969 joe colombo
    Visiona 1, 1969 joe colombo © Visiona 1, Joe Colombo, 1969 - DR
    Pour Joe Colombo, les cellules d'habitation devaient répondre à chaque besoin de l'individu : une cellule bain, une cellule nuit, une cellule cuisine et une unité centrale, (comme Visiona 1 ici présentée à la Foire de Cologne, en 1969) créant ainsi au sein d'une même grande pièce, des espaces dynamiques et utilisables de manières diverses.
    (Aménagement de l'intérieur expérimental Visiona 1, 1969. Bayer, Leverkusen, divers matériaux venant de Bayer, avec T. Bonaretti, A. Grieco, I. Favata et M.P. Valota).
    Les "cellules d'habitation"

    Autre vision - Joe Colombo, l'invention du futur

    Appartement Zancopè, 1965 joe colombo
    Appartement Zancopè, 1965 joe colombo © Appartement Zancopè, Joe Colombo, 1965
    Le design de Joe Colombo visionnaire et futuriste était résolument contemporain. Ces créations ne dépareilleraient pas nos intérieurs aujourd'hui. Appartement Zancopè, 1965, via Sismondi, Milan, vue du salon.
    Autre vision - Joe Colombo, l'invention du futur
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