Faire de son jardin un refuge pour la biodiversité, mode d'emploi

    Mis à jour le 30 mai 2024
    Date de publication et auteurs
    Publié le 29 mai 2024 par Lucien Brenet
    EXTÉRIEUR. A l'heure de la transition écologique, et alors que la situation du vivant n'a jamais été aussi préoccupante, tout geste allant dans le sens de la préservation de la biodiversité est bon à prendre. Et en la matière, son jardin et sa maison sont de bons supports !
    La biodiversité est certes un sujet complexe, mais pour le particulier qui souhaiterait rendre son logement plus accueillant tout en favorisant l'installation du vivant, il suffit d'appliquer une série de petits gestes simples.
    Pour attirer la biodiversité chez soi, tout commence par le jardin. Lucile Dewulf, naturaliste et écologue au sein de l'Agence régionale de la biodiversité, explique qu'il faut tout d'abord ouvrir ses extérieurs sur le vivant : "Pour les animaux, le jardin privé est une frontière qui n'existe pas. C'est pourquoi, il faut laisser des ouvertures dans sa clôture, ou ce qui délimite le jardin, afin de permettre à différents cortèges d'espèces de circuler."

    Ne pas être trop interventionniste

    Une fois la biodiversité entrée, encore faut-il qu'elle ait envie d'y rester. Il faut donc rendre son jardin accueillant par une gestion mesurée, voire la non-gestion. Premier conseil : proscrire toute utilisation de produits chimiques ; y compris les remèdes de grand-mère à base de produits naturels qui, pas toujours sélectifs, éliminent les espèces sans distinction. Pour attirer des espèces indigènes et en nombre, il est important de privilégier les essences locales et de les diversifier.
    "Il peut s'agir aussi de laisser vieillir les arbres même s'ils commencent à dépérir. Par exemple, des troncs avec des cavités servent aux espèces cavicoles qui peuvent s'y nicher", explique Lucile Dewulf. Lors de la taille des haies ou des arbres, les tas de bois laissés au sol seront autant d'abris adaptés aux hérissons ou aux reptiles pour y passer l'hiver.
     
    A noter : Les haies sont de bons supports de gîte et d'alimentation pour les espèces. Raison pour laquelle il faut les tailler en hiver, en période de végétation des plantes et non au printemps, période à laquelle débute la nidification.

    Les hôtels à insectes, une fausse bonne idée

    Autre solution plus interventionniste : installer des nichoirs à oiseaux, ou encore des abris à chauve-souris qui pourront venir s'abriter quelques jours et se nourrir d'insectes lorsqu'elles sont en transit. Car un jardin vivant l'est beaucoup grâce aux insectes. Ce sont eux qui attireront oiseaux, chauves-souris, voire d'autres insectes prédateurs comme les libellules, etc. Il faudra, par exemple, tondre la pelouse au bon moment de l'année - entre octobre et mars -, laisser des espaces en libre évolution et sans entretien comme une prairie fleurie pour permettre aux insectes d'y faire tout leur cycle de vie, lequel s'étale parfois sur plusieurs mois. Ce peut être aussi de laisser une zone de terre nue pour les espèces terricoles, comme la Collète du lierre, ou encore les bourdons.
    Les hôtels à insectes ont surtout un intérêt pédagogique, plutôt qu'écologique. Les abeilles solitaires pourront élire domicile dans de petits rondins de bois ou morceaux de bambous ; elles viendront ainsi polliniser les fruits et légumes qui poussent dans le jardin. En outre, l'observation de ce petit monde d'ordinaire très peu visible, constituera une activité ludique pour les enfants.
    Attention toutefois, l'hôtel à insectes a ses limites. "Vouloir une multitude d'espèces dans un seul habitat peut entraîner de la compétition, mais aussi de la prédation car certaines espèces sont territoriales." C'est pourquoi Lucile Dewulf recommande de répartir tous ces micro-habitats sur l'ensemble du jardin.
     
    Bon à savoir : "La biodiversité rend des services lorsqu'on cultive un potager", fait remarquer Lucile Dewulf. C'est pourquoi il peut être intéressant de mener des actions favorisant l'installation d'espèces auxiliaires qui débarrasseront le jardin des ravageurs. Les hérissons raffolent par exemple, des escargots et des limaces, quand les coccinelles et les syrphes se délectent des pucerons.

    Penser aux zones humides

    Les zones humides remplissent aussi un rôle essentiel. Il est fortement conseillé d'utiliser les eaux de pluie en les récupérant dans des bacs dédiés, ou alors en les redirigeant vers des zones laissées humides qui conviendront aux espèces hygrophiles. Creuser une mare ou un bassin imperméabilisé peut également s'avérer judicieux : plantes et Insectes aquatiques ou semi-aquatiques, libellules, amphibiens... La faune et la flore coloniseront naturellement ces espaces au fil du temps. "La colonisation par les libellules ira plus vite puisqu'il s'agit d'espèces volantes. En revanche, les amphibiens pourront avoir plus de mal à s'installer si le jardin est situé dans un contexte urbain dense sans continuité écologique", prévient Lucile Dewulf.
    En plus de servir de point d'eau pour les espèces sauvages, les zones humides favorisent l'installation de prédateurs des moustiques et des pucerons.

    La façade comme support de la biodiversité

    Il est aussi possible de s'appuyer sur sa maison pour favoriser le retour de la biodiversité. Dans le neuf, la manœuvre est plus difficile. "Les dernières normes environnementales (RT2012 et RE2020) ont eu pour effet de réduire la perméabilité du bâti à la faune et la flore", déplore Marc Barra, écologue à l'Agence régionale de la biodiversité Île-de-France. En effet, toutes les anfractuosités auparavant disponibles en façade pour de nombreuses espèces, disparaissent. "Dans le bâti ancien en revanche, les joints en torchis, en terre ou en chaux, les murs en pierres sèches, servent d'abris à certaines espèces d'insectes et de reptiles." Lors d'une rénovation de façade, il peut aussi être intéressant de prévoir quelques nichoirs adaptés ou d'installer de petits pots percés en terre cuite pour que des espèces d'insectes puissent s'y abriter.
    La végétalisation est l'autre grand sujet sur le bâti. Les plantes grimpantes, comme la vigne vierge ou la glycine, et les plantes retombantes comme les clématites ou le jasmin, sont de véritables aimants à biodiversité, pollinisateurs en tête. Attention toutefois, les gouttières et la toiture devront être régulièrement contrôlées afin de s'assurer que les plantes ne les fassent pas bouger ou ne les bouchent pas.
    Moyennant un important budget, une toiture plate peut être entièrement végétalisée. Si l'étanchéité du toit est suffisamment bonne, il est aussi possible d'apposer un substrat à base de terre et de compost et de laisser la nature s'y installer.

    Éviter de trop éclairer la nuit

    Dans le règne animal, la vie nocturne est plutôt animée. Et pour ces espèces aussi, nous pouvons mettre en œuvre des gestes simples afin de favoriser leur installation et de perturber le moins possible leur mode de vie.
    Marc Barra identifie quatre gestes à appliquer : "Il faut orienter les sources lumineuses vers le bas ; utiliser des longueurs d'ondes qui perturbent moins les espèces, comme le jaune orangé, plutôt que les LED blanches, plus perturbatrices ; éteindre quand l'éclairage n'est pas indispensable ; réduire le niveau d'éclairage à certains endroits."
    Enfin, si l'impact réel des chats sur la biodiversité est difficile à établir, il n'en demeure pas moins des chasseurs hors pair. Quelques astuces simples peuvent limiter leur impact sur la faune alentour. Par exemple, un collier avec une clochette permettra de prévenir les animaux de l'arrivée du prédateur. Il est déconseillé de sortir ses chats à certaines heures, comme à la tombée de la nuit lorsque les animaux nocturnes démarrent leur journée.
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