Maison à part : Lors de cette cession, tous les membres de l'observatoire Maison & Objet se sont penchés sur la question de l'intime. Pourquoi avoir choisi de prendre ce thème comme sujet de réflexion ? Vincent Grégoire* : Pour dire la vérité, ce thème s'est imposé à nous de lui-même. Dans le contexte où nous sommes actuellement, qui est un contexte de peur, où les images de violence sont partout autour de nous, tous les consommateurs n'arrêtent pas de vouloir plus d'intimité. Ils ont envie de se créer une bulle mais, en même temps, paradoxalement, ils n'ont jamais autant dévoilé d'eux-mêmes. Ils s'exposent, mettent leurs sentiments à nu sur Internet, enlèvent les rideaux aux fenêtres de chez eux... MAP : Quel impact cette attitude paradoxale devrait-elle, selon vous, avoir sur la physionomie de nos intérieurs ? V.G : La maison va se transformer en une véritable scène de théâtre, où tout est scénographié et chorégraphié. Comme pour exorciser nos peurs, nous allons avoir tendance à y introduire des objets emprunts de violence : certains brûlés, d'autres froissés, cabossés ou déchirés. MAP : La maison, une scène de liberté en quelque sorte ? V.G : Oui, tout à fait. Comme les gens ont plus confiance en eux, la maison va plus que jamais devenir un territoire où l'on ose, où l'on laisse éclater son besoin de sensualité, voire même ses désirs sexuels. Tout le monde va se lâcher, y compris la ménagère de moins de moins de cinquante ans qui aura envie, elle-aussi, d'introduire une touche d'excentricité ou d'érotisme dans son intérieur bien rangé.  MAP : Comment cette excentricité va-t-elle se traduire concrètement ? V.G : Cette excentricité va prendre la forme d'un détail "chic et choc" introduit dans chaque pièce : des coussins portant des messages coquins disposés sur le lit de la chambre, des produits de beauté aux graphismes libertins placés en évidence sur une commode, des tables basses entièrement recouvertes de clous dans le salon... Bref, des objets qui secouent l'ordre établi sans pour autant enlever au reste de la décoration son élégance. MAP : Quelles couleurs et quelles matières faut-il s'attendre voir à émerger ? V.G : Côté couleurs, on devrait surtout voir émerger une large palette de roses, allant du rose tendre au rose sang, en passant par du fuchsia, ponctuée de faux noirs profonds. Côté matériaux, on va être sur un registre très sensuel avec du cuir, du vinyle, de la fourrure, des plumes... Le tout sur fond de strass et de paillettes. MAP : Finalement, en termes de style, on est très proche de la tendance "punk rock" que vous aviez récemment mise au jour ? V.G : Oui, absolument. On est exactement dans la même lignée sauf que, cette fois, il y a dans l'air une énergie féminine. Les femmes prennent le pouvoir dans le design, elles deviennent plus extrémistes, plus radicales et, du coup, s'approprient la tendance "punk rock" qu'elles rendent à la fois sexy et arrogante, à la Lady Gaga (Chanteuse américaine excentrique, ndlr).

MAP : A quelles femmes designers pensez-vous ?

V.G : Je pense notamment à Florence Jaffrain qui a fait beaucoup parler d'elle avec "Belly Love", un canapé entièrement recouvert de fibres photo luminescentes dans lequel on peut se lover à plusieurs. Un objet terriblement sensuel ! Je pense aussi à Matali Crasset qui s'est également aventurée sur le terrain en imaginant un sextoy, le "8th heaven'. Pour découvrir les objets qui peupleront notre intérieur en 2011, cliquez sur suivant. *Vincent Grégoire est à la fois directeur du département "art de vivre" du cabinet de conseils et prospectives NellyRodi et membre de l'observatoire Maison & Objet.